Pendu par le crochet — Le châtiment oublié de l’Europe
Le crochet du bourreau : l’horrible instrument d’exécution médiéval conçu pour tuer lentement et transformer la mort publique en spectacle.
Au cœur de Prague, en 1583, une foule se rassemblait sur la place principale. L’atmosphère était sombre, chargée d’appréhension. Au centre, une simple structure en bois se dressait, sa sinistre fonction évidente. De sa poutre supérieure pendait un crochet de fer. Pas un hameçon, ni un outil de boucher, mais une pièce de fer courbée, de la taille d’une main, aiguisée pour transpercer la chair et conçue pour supporter le poids d’un corps vivant. C’était le crochet du bourreau, un instrument de torture et d’exécution utilisé à travers l’Europe pendant des siècles, conçu pour infliger une mort lente, douloureuse et publique.
Cette méthode horrible contrastait fortement avec le claquement sec de la corde ou le coup de hache miséricordieux. Le condamné était hissé par le crochet, qui lui transperçait une côte, la mâchoire ou l’abdomen, et laissé pendre jusqu’à ce que la vie le quitte dans d’atroces souffrances, par hémorragie, choc ou hypothermie. La mort pouvait durer des heures, voire des jours.
Cet instrument, connu en allemand sous le nom de Fleerhan (« crochet du boucher »), était exactement ce que son nom suggérait : un outil emprunté à l’abattoir et détourné pour les corps humains. Cette macabre transformation reflétait la croyance médiévale répandue selon laquelle les criminels étaient moins qu’humains, de la simple chair à canon, à dépouiller de toute dignité et à exhiber comme avertissement public.
Forgé pour l’agonie : La conception de la cruauté d’État
Un crochet de bourreau typique était forgé en fer, avec une tige épaisse pour la solidité, une large courbe inquiétante pour immobiliser le corps et une pointe pointue comme une aiguille pour la pénétration. Ces crochets mesuraient généralement entre 25 et 40 cm, assez robustes pour supporter le poids d’un adulte. Certains modèles étaient encore plus complexes, dotés de deux ou trois crochets pour mieux immobiliser la victime et prolonger son supplice.

Ces crochets étaient des éléments permanents, souvent fixés aux poutres en bois des potences, à de hauts poteaux, ou même directement sur les murs extérieurs des châteaux et des hôtels de ville. Ils rappelaient silencieusement et constamment le pouvoir absolu de l’État de punir.
Le mode d’exécution était un rituel soigneusement orchestré, variant selon la région, la gravité du crime et le choix du bourreau.
Une méthode courante et atroce consistait à enfoncer le crochet sous la cage thoracique de la victime, le transperçant entre les os sans rompre immédiatement les organes vitaux. Le condamné a ensuite été soulevé et suspendu sur le côté. Sous le poids du corps, la chair se déchirait lentement autour du métal jusqu’à ce que le choc et l’hémorragie entraînent une fin misérable. Cette méthode n’était pas censée être mortelle instantanément ; son efficacité était mesurée à l’agonie qu’elle infligeait.
D’autres formes d’application étaient tout aussi horribles :
La perforation de la tête ou du cou : le crochet était parfois enfoncé sous la mâchoire, traversait la bouche ou la gorge, puis ressortait par le crâne, entraînant une mort plus rapide, quoique toujours atroce, par hémorragie ou suffocation.
La perforation de l’abdomen : une variante particulièrement cruelle consistait à enfoncer le crochet dans l’abdomen ou le dos, en évitant soigneusement le cœur et les poumons afin de prolonger l’agonie le plus longtemps possible.
Le choix du point d’insertion du crochet n’était jamais aléatoire ; il était profondément symbolique. Le corps était littéralement transformé en une toile sur laquelle s’inscrivait la justice. Un crochet sous les côtes pouvait signifier la « trahison » d’un traître, tandis que l’insertion par la bouche était réservée aux crimes comme le blasphème ou le parjure. Ce « langage du châtiment » élaboré transformait l’exécution en un sermon public, un théâtre de la peur effrayante où la loi, la religion et la violence se confondaient.
Le théâtre de la peur et les cages anabaptistes
Les archives historiques brossent un tableau sinistre de l’utilisation répandue du crochet. À Amsterdam, des crochets étaient fixés en permanence au mur extérieur du Waag (la maison de pesée) sur la place du Dam, exposant les criminels comme un avertissement sinistre. À Nuremberg, ville tristement célèbre pour sa cruauté judiciaire, les bourreaux conservaient des crochets dans le Lochgefängnis (la prison du trou), une tour dédiée à l’extraction de la douleur et de l’obéissance. Partout dans le Saint-Empire romain germanique, dans des villes comme Prague et Vienne, les exécutions par crochet sont devenues monnaie courante, surtout pendant les guerres de Religion, d’une violence extrême, où la brutalité sectaire a trouvé de nouveaux exutoires.
L’un des cas les plus tristement célèbres s’est produit à Münster, en Allemagne, en 1535. Après la répression de la révolte anabaptiste radicale, les forces catholiques ont cherché à faire un exemple inoubliable des chefs du mouvement. Jan van Leiden et ses compagnons, Bernd Knipperdolling et Bernd Krechting, ont été soumis à des heures de torture avec des pinces rougies au feu avant d’être finalement exécutés.
Mais leur punition ne s’est pas arrêtée à la mort. Leurs corps ont été placés dans des cages de fer et pendus à des crochets, tout en haut du clocher de l’église Saint-Lambert. Ils y sont restés pendant des siècles, comme un avertissement sans équivoque aux hérétiques et aux traîtres. Ces mêmes cages rouillées et vides y sont encore suspendues aujourd’hui, un témoignage visible et poignant.


