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Moquée, elle surprend tous quand le plus riche l’appelle sa femme et fait taire la salle !

 

 

Moké. Elle surprend tout le monde quand le millionnaire le plus riche l’appelle ma femme et fait terire la salle. Abonnez-vous pour découvrir la suite. Le réveil sonne à 6 heures précises dans le minuscule studio de Léa, situé au 5e étage sans ascenseur d’un immeuble hausmanien délabré du 11e arrondissement.

 Les murs fins laissent passer les bruits de la circulation matinale sur le boulevard Voltaire. Mélange de claxon et de moteurs de scooter qui forment la symphonie quotidienne de Paris. Lesa Morau étirent ses membres en Dolori sur le canapé lit qui fait office de chambre accouchée.

 À 28 ans, elle a appris depuis longtemps à optimiser chaque centenètre carré de ses 25 m carrette microscopique, la salle de bain où l’on peut à peine se retourner et cette pièce unique qui sert de salons, chambres et ateliers d’art improvisés. “Encore une journée”, murmure-elle en regardant par la fenêtre le ciel parisien couvert de nuages gris.

 Novembre à Paris a cette particularité de rendre même les plus optimistes mélancoliques et Léa n’échappe pas à cette règle. Elle enfile son uniforme noire réglementaire. Pantalon simple, chemises blanches et tablier. Dans le miroir fissuré de sa salle de bain, elle attache ses longs cheveux chatins en un chignon pratique. Ses yeux verts hérités de sa mère gardent cette lueur de détermination qui l’a aidé à survivre depuis la mort de ses parents dans un accident de voiture quand elle avait 18 ans. Le café chez Margaot ouvre ses portes à 7h. Léa arrive toujours 15 minutes en avance.

Une habitude développée au fil des années pour éviter les remarques de Margaot, la patronne au caractère bien trempé qui a eu la gentillesse de l’embaucher il y a trois ans sans expérience préalable. “Salut ma belle”, lance Margaot depuis derrière le comptoir en zinc, déjà en train de préparer les premières cafées de la journée.

 À 60 ans passés, cette ancienne institutrice reconvertie dans la restauration a gardé l’autorité naturelle de son ancien métier. “Tu as l’air fatigué. Tu as encore dessiné jusqu’à tard.” Léa sourit en nouant son tablier. Un peu. J’essaie de terminer une série de portraits pour un client. Ça m’aidera à économiser pour reprendre les cours à l’école des beauxarts. Margaot secoue la tête avec affection.

 Cette gamine travaille trop, pense-elle, mais elle admire sa persévérance. Fais attention à ne pas t’épuiser et n’oublie pas les retrouvailles de ton lycée. C’est ce soir, tu y vas. Le visage de Léa se ferme légèrement. L’invitation est arrivée par mail il y a un mois. Retrouvaille de promotion. Lycée Sainteviève, 10x ans après le baccalauréat, palace George V.

 Rien que le nom de l’hôtel lui donne des sueurs froide, je ne sais pas encore. Le ticket d’entrée coûte 80 € et franchement avec mes anciens camarades, elle laisse sa phrase en suspend mais Margaot comprend. Les premiers clients commencent à arriver, les habitués du matin, ouvriers du BTP qui prennent leur café croissant de boutes au comptoir, employés de bureaux qui commandent leur cappuccino à emporter. Léa connaît leurs habitudes par cœur.

 Monsieur Dubois comptable dans une PME, toujours un café allongé avec un sucre. Madame Chen, infirmière à l’hôpital Saint-Antoine, un thé vert et un pain au chocolat qu’elle mange en vitesse avant de prendre le métro. Vers 10h, l’affluence diminue. Léa profite de ce moment calme pour nettoyer les tables et réorganiser la vitrine des pâtisseries.

 C’est à ce moment-là que son téléphone vibre. Un message Instagram d’Amélie Rousseau, ancienne camarade de classe. Coucou Léa, j’espère te voir ce soir au retrouvaill. Ça va être génial, tout le monde sera là. Même Julien Baumont, tu te souviens de lui ? Il a repris l’empire familial. Il paraît qu’il vaut des millions maintenant. Bise, Léa soupire.

 Bien sûr qu’elle se souvient de Julien Baumont, le garçon discret de la classe, toujours plongé dans ses livres, qui ne parlaient presque à personne. Contrairement à Amélie et sa bande qui formait l’élite sociale du lycée privé Sainte Viie, Léa était là grâce à une bourse d’excellence.

 Ses parents, employés municipaux, avaient fait d’énormes sacrifices pour compléter les frais de scolarité. “Tu penses à quoi ?” demande Margaot en voyant l’expression songeuse de sa serveuse. “À ma place dans ce monde, je crois.” Léa montre le message sur son téléphone. Regarde ça, il parle de millions de palace et moi, je suis là à 30 ans presque à servir des cafés en rêvant de reprendre des études d’art.

Margot pose sa main sur l’épaule de Léa. Écoute-moi bien, ma fille. Ta valeur ne se mesure pas à ton compte en banque. Tu es intelligente, travailleuse et tes dessins sont magnifiques. Ne laisse personne te faire croire le contraire. Mais en fin d’après-midi, quand Léa rentre dans son studio, les mots d’Amélie raisonnent encore dans sa tête.

Elle regarde sa garde-robe. Quelques robes simples, des pulls, des jeans, rien qui convienne pour un palace cinq étoiles. Elle prend sa décision, elle ira quand même avec sa plus belle robe noire, celle qu’elle a acheté dans une fripie de qualité du marais et la fierté comme seul accessoire.

 Le palace George 5 illumine l’avenue du même nom de ses 1000 feux dorés. Léa remonte l’avenue en métro puis à pied, ses escarpins noirs, les seuls qu’elle possède, claquant sur le trottoir parisien encore humide de la pluie de l’après-midi. Elle a passé deux heures à se préparer dans son studio, se maquillant avec soin et disciplinant ses cheveux en un chignon élégant qu’elle a appris à faire grâce à des tutoriels YouTube.

 Sa robe noire cintrée dénichée pour 15 € chez Vintage and Co, épouse parfaitement sa silhouette fine avec le collier de perles de sa mère, son seul bijou de valeur, elle espère passer inaperçu le temps d’une soirée dans ce monde qui n’est pas le sien. Devant l’entrée majestueuse de l’hôtel, Léa inspire profondément.

 Les portes en vert ornées de dorure s’ouvrent devant elle, dévoilant un hall somptueux aux marbres multicolores et au lustre de cristal. Un parfum délicat de rose et de luxe flotte dans l’air conditionné. “Bonsoir, mademoiselle. Puis-je vous renseigner ?” demande poliment l’homme en livré doré derrière le bureau de réception.

 “C’est pour les retrouvailles du lycée Sainte John Viève, salle impériale”, répond Léa en essayant de masquer son intimidation. Bien sûr, c’est au premier étage. Les ascenseurs sont à votre droite. L’ascenseur au miroir doré la renvoie à sa propre image. Elle n’a pas à rougir de son apparence, mais elle sait déjà qu’elle détonnera au milieu des tenues hautes couture qui l’attendent.

 La salle impériale bourdonne déjà de conversations animées quand Léa pousse les lourdes portes. Le décor est à couper le souffle. Plafond à caisson doré, tapisserie d’époque et une vue imprenable sur les jardins privés de l’hôtel.

 Ses anciens camarades de classe, maintenant trentenair évoluent dans leurs plus beaux atours entre les serveurs en gant blanc qui proposent champagne et canapé raffiné. “Léa, Léa ! Morau, tu es venu finalement !” Amélie Rousseau fond sur elle comme un rapace vêtu d’une robe Chanel rose poudrée qui coûte probablement plus cher que le loyer annuel de Léa. “Oh mon dieu, regarde-toi, tu es différente. Tu travailles où maintenant ?” L’attaque est directe, à peine masquée derrière un sourire de façade.

 Qu’autour d’Amélie, le groupe des populaires du lycée s’est reconstitué. Camille devenu notaire, marié à un chirurgien, Thomas trader dans une banque d’affaires. Sophie attaché de presse dans le luxe. “Je travaille dans un café du 11e”, répond Léa avec toute la dignité qu’elle peut rassembler.

 “Et toi, toujours dans l’immobilier de prestige ?” “Oh oui, d’ailleurs, tu sais quoi ? Je viens de vendre un appartement de 3 millions à Montagne. Le client a payé cash. Tu imagines ? Amélie rit un rire cristallin qui raisonne comme une clochette d’argent. Et tu habites toujours chez tes parents ? Léa sent les regards se poser sur elle.

 Elle sait qu’ils savent tous d’une manière ou d’une autre qu’elle a perdu ses parents. Mon appartement, dit-elle simplement dans le 11zie. C’est ça. Comme c’est pittoresque le ton d’Amélie dégouline de condescendance. Et côté sentimental, un petit ami barista pour aller avec le café. Le groupe éclate de rire et Léa sans ses joues sans pourprès. Elle cherche une échappatoire du regard quand elle aperçoit, près des grandes fenêtres donnant sur les jardins, une silhouette familière mais transformée. Julien Baumont a troqué sa dégaine d’adolescents timide contre l’élégance

naturelle d’un homme d’affaires accompli. Grand, les cheveux chattent clairs parfaitement coiffés, vêtus d’un costume surmesure bleu marine qui soulligne sa carrure athlétique, il discute calmement avec un groupe d’invités.

 Ses yeux bleus qu’elle se souvient avoir trouvé remarquables au lycée balayent la salle et s’arrê sur elle. “Tiens, regarde qui nous honore de sa présence”, lance Thomas en suivant le regard de Léa. “Le prince Julien en personne. Tu sais qu’il dirige maintenant tout l’empire Baumont ? Hôtel, joaillerie immobilier. On dit qu’il pèse plus de 100 millions et il est toujours célibataire, ajoute Sophie avec un sourire carnacier. Toutes les héritières de Paris lui courte après.

 Amélie lisse sa robe et remet une mèche en place. J’ai entendu dire qu’il cherchait quelqu’un de son milieu, quelqu’un qui comprenne les responsabilités qui vont avec sa position. Léa assiste à cette conversation comme à un spectacle dont elle ne fait pas partie. Elle saisit une coupe de champagne sur le plateau d’un serveur qui passe, plus pour se donner une contenance que par envie de boire.

“En tout cas, reprend Amélie en regardant Léa avec un sourire mauvais, ce n’est pas avec une serveuse de café qu’il va faire sa vie. Il faut rester réaliste, n’est-ce pas ?” Le groupe éclate encore de rire et cette fois Léa sent quelque chose se briser en elle. Pas à sa fierté. Celle-ci reste intacte. Mais plutôt cette partie d’elle qui espérait encore retrouver ne serait-ce qu’un semblant de camaraderie.

 avec ces gens qui ont partagé ces années de lycée, elle s’apprête à poser sa coupe et à quitter la soirée quand une voix grave et posée s’élève derrière elle. Excusez-moi, je peux vous emprunter ma femme quelques instants ? Le silence qui suit cette phrase est si total qu’on pourrait entendre une plume tomber sur les tapis perçants de la salle impériale.

 Le silence dans la salle impériale est si profond que Léa entend distinctement le teintement des cristaux du lustre au-dessus de leur tête agité par la ventilation discrète. Tous les regards convergent vers elle et vers l’homme qui vient de la revendiquer comme son épouse devant l’assemblée médusée. Julien Baumont se tient derrière elle, imposant dans son costume surmesure une main posée avec une assurance déconcertante sur son épaule nue.

 Léa sent la chaleur de ses doigts à travers le tissu fin de sa robe et son parfum, un mélange subtil de cèdre et d’agrume l’enveloppe comme un cocon protecteur. Julien ! Amélie est la première à retrouver l’usage de la parole, mais sa voix sort dans un registre plus aigu qu’à l’ordinaire. Tu tu veux dire que Léa et toi vous êtes mariés ? Depuis 6 mois, confirme Julien avec un calme olympien comme s’il parlait de la météo.

 Nous avons préféré garder cela discret, vous comprenez ? Léa tient à son indépendance professionnelle. Léa se retourne légèrement vers lui, les yeux écarquillés. Dans son regard bleu acier, elle lit un message muet. Fais-moi confiance. Quelque chose dans cette expression la rassure, même si son cœur bat la chamade et qu’elle ne comprend rien à ce qui se passe. Mais comment Thomas bafouille ? Son verre de champagne suspendu à mi-chemin entre la table et ses lèvres.

 Vous ne vous parliez même pas au lycée. Les chemins de l’amour sont imprévisibles ? Répond Julien avec un sourire énigmatique. Sa main glisse naturellement de l’épaule de Léa vers sa taille. Un geste possessif mais étrangement réconfortant. Nous nous sommes retrouvés par hasard il y a deux ans dans une galerie d’art du Marais. Léa exposait ses œuvres.

 Léa reste pétrifiée. Comment peut-il savoir qu’elle fait de l’art ? Comment peut-il mentir avec une telle aisance en incorporant des détails si précis de sa vraie vie ? Une galerie d’art. Sophie, l’attachée de presse, reprend du poil de la bête. Laquelle ? Je connais bien le milieu artistique parisien. La galerie Mig, répond Julien sans hésitation.

 Une exposition collective sur les jeunes talents. Le travail de Léa m’a immédiatement séduit. Elle a un don pour saisir l’âme des gens dans ses portraits. Camille, la notaire plisse les yeux. Et vous avez décidé de vous marier comme ça, sans faire part, sans cérémonie. Mairie du 4e arrondissement un mardi matin précise Julien en resserrant imperceptiblement son étreinte autour de la taille de Léa.

Témoin, quelques amis proches, Léa ne souhaitait pas de grand tralala. N’est-ce pas chérie ? Il baisse les yeux vers elle et dans ce regard, Léa lit une supplique silencieuse. Elle comprend instinctivement qu’il lui offre une échappatoire, une revanche sur toutes les humiliations qu’elle vient de subir.

 Sa voix quand elle répond est plus assurée qu’elle ne l’aurait cru possible. Exactement. J’ai toujours trouvé que l’amour n’avait pas besoin de strace et de paillettes pour être authentique. Un murmure parcourt l’assemblée. Les autres invités, attirés par l’atroupement et les éclats de voix, se rapprochent progressivement.

 Léa reconnaît d’autres visages du lycée, des professeurs à la retraite, tous tendant l’oreille pour ne pas perdre une miette de cette révélation explosive. Amélie, le teint soudain plus pâle sous son maquillage parfait, tente une dernière offensive. C’est c’est merveilleux, bien sûr, mais avoue que c’est surprenant.

 Léa travaille encore comme serveuse, n’est-ce pas ? Dans un petit café ? Léa travaille par passion, pas par nécessité. Intervient Julien d’une voix légèrement plus froide. Elle finance ses créations artistiques par ses propres moyens. J’admire cette indépendance d’esprit. C’est d’ailleurs ce qui m’a séduit chez elle.

 Il se tourne vers Léa avec un sourire qui semble si naturel qu’elle en oublierait presque que tout cela n’est qu’une mise en scène. D’ailleurs, chérie, tu ne m’as pas dit comment s’était passé ta journée au café. Margaot va bien. Le détail sur Margaot la laisse sans voix. Comment peut-il connaître l’existence de sa patronne ? Elle improvise. Portée par l’élan du mensonge collectif. Très bien. Elle te passe le bonjour d’ailleurs. Elle dit que tu devrais passer prendre un café un de ses jours. Avec plaisir.

J’adore ce petit établissement authentique. On y trouve une chaleur humaine qu’on ne retrouve plus dans les grands hôtels. Thomas, qui se remet lentement de sa surprise tente de reprendre le contrôle de la situation. En tout cas, félicitations. C’est c’est une nouvelle fantastique. Il faudra qu’on se revoit tous les quatre. Sophie organise régulièrement des soirées dans son appartement de Neil.

 Nous serions ravis, répond Julien, mais nos emplois du temps sont assez chargés ces temps-ci. Léa prépare une nouvelle exposition et de mon côté, nous ouvrons trois nouveaux hôtels en Europe cette année. Léa sent que la soirée bascule complètement. Les regards posés sur elle ne sont plus les mêmes.

 Fini le mépris et la condescendance, place à une curiosité mêlée de respect et chez certains d’une pointe d’envie mal dissimulée. Une exposition, relance Sophie, journaliste dans l’âme. Où ça ? Quand Léa se lance porté par l’adrénaline et par la main rassurante de Julien sur sa taille. C’est encore en discussion. Plusieurs galeries sont intéressées.

 Le marché de l’art contemporain est très porteur en ce moment, ajoute Julien. surtout pour les artistes qui, comme Léa, ont une approche intimiste du portrait. Elle saisit des émotions que d’autres ne voient même pas. Madame Blanchard, leur ancienne professeur de français, s’approche du couple avec un sourire bienveillant.

 Mais félicitations, mes chers enfants, Julien, votre mère doit être aux anges. Et vos parents, Léa, oh, pardonnez-moi. Un silence gêné s’installe. Julien resser son étreinte et Léa sent qu’il comprend intuitivement sa douleur. “Papa et maman nous regardent d’en haut”, dit-elle simplement. Ils auraient adoré Julien. “J’en suis certain”, murmure celui-ci et dans sa voix perce une émotion qui ne semble pas feinte.

 La soirée se poursuit mais l’ambiance a complètement changé. Léa, qui était venue en prévoyant de rester une heure par politesse, se retrouve au centre de toutes les attentions. On l’interroge sur son art, on lui demande des conseils d’éco, on évoque d’éventuelles commandes de portraits.

 Julien ne la quitte pas d’une semelle, jouant à la perfection le rôle du mari attentionné et amoureux. Il la ressert en champagne, lui apporte des canapés, participe aux conversations avec une aisance naturelle, tout en la couvant du regard, comme s’il découvrait chaque jour de nouvelles facettes de sa personnalité.

 Vers 22h, alors que la soirée commence à s’essouffler, il se penche vers elle et murmure à son oreille : “Nous devrions peut-être y aller. J’ai ma voiture en bas.” L’air frais de novembre fait du bien à Léa après la chaleur étouffante de la salle de réception. Julien la guide vers une Aston Marting gris métallisée garée devant l’entrée du George c sous l’œil respectueux du voiturier qui lui tend les clés avec un bonne soirée monsieur Baumontli de déférence.

 Une fois installé dans le cuir crème de l’habitacle, Léa laisse échapper un long soupir. La tension accumulée pendant ses trois heures de comédie retombe d’un coup la laissant épuisée et perplexe. “Alors, dit-elle en attachant sa ceinture, “tu m’expliquer ce qui vient de se passer ? Julien démarre le moteur, un ronronnement feutré qui contraste avec le chaos de ses pensées et s’engage sur l’avenue George X avant de répondre.

Les lumières de Paris défilent derrière les vitres teintées, créant une ambiance cocon qui invite aux confidences. “J’ai entendu ce qu’il te disait”, dit-il simplement. “Ces commentaires sur ton travail, ton appartement, ta situation. Ça m’a mis en colère.” En colère, Léa l’observe de profil.

 Dans la pénombre de l’habitacle, éclairé par intermittence par les réverbaires, son visage garde cette expression concentrée qu’elle se souvient avoir vu au lycée quand il réfléchissait à un problème complexe. Pourquoi ? On ne sait jamais vraiment parler à Sainte Viève. Julien s’arrête à un feu rouge avenu Marceau et se tourne vers elle. Détrompe-toi.

 Je t’observais souvent au lycée. Tu étais différente des autres. Tu ne te mêlais pas au petit groupe. Tu ne participais pas au ragot. Tu lisais pendant les pauses. Tu dessinais dans les marges de tes cahiers. Léa sans ses joues sans pourprès. Tu me remarquais ? Comment ne pas te remarquer ? Tu étais la seule qui soit restée authentique dans ce milieu de privilégié.

 Et ce soir, en voyant Amélie et sa bande te traiter comme si tu étais moins que rien, il serrent les mâchoires. J’ai voulu leur clouer le bec. Le feu passe au vert. Julien redémarre et il remonte les Champsélysées dans un silence pensif. Léa observe les façades illuminées des boutique de luxe.

 Ce paris nocturne qu’elle connaît si peu depuis son studio du 11zie. “Mais comment tu sais tout ça sur moi ?” demande-t-elle finalement. “La galerie Margaot, Monart, tu as dit des choses très précises.” Un sourire mystérieux éclaire le visage de Julien. Internet est une mine d’information. Tu as un compte Instagram pour tes œuvres. Tu as participé à quelques expositions collectives. J’ai fait mes recherches.

Tu me stalk sur les réseaux sociaux ? Léa ne sait pas si elle doit être flattée ou inquiète. Je préfère dire que je m’intéresse à ton parcours. Il négocie le rond-point de l’Arc de Triomphe avec l’aisance de quelqu’un qui a l’habitude de conduire dans Paris. Et puis tu as oublié un détail. J’ai déjà acheté un de tes dessins.

 Quoi ? Léa se tourne complètement vers lui, incrédule. Il y a six mois, à la petite exposition du marais dont j’ai parlé, tu avais exposé une série de portraits de gens ordinaires dans le métro. J’ai acheté celui de la dame âgée qui lisait, assise sur un strapontin de la ligne, il est accroché dans mon bureau. Léa se souvient parfaitement de ce dessin.

 Une femme d’une soixantaine d’années, élégante malgré ses vêtements simples, absorbé dans la lecture d’un roman de poche. Elle avait passé des heures à saisir cette expression de sérénité au milieu de l’agitation matinale du métro. C’était toi, l’acheteur anonyme coupable.

 Julien quitte les Champs-Élysées pour s’engager vers République. J’ai voulu rester discret. Je ne voulais pas que tu penses que c’était par pitié ou par condescendance. Il traverse le troisième arrondissement et Léa réalise qu’il se dirige vers son quartier. “Comment tu sais où j’habite ?” “L’adresse de livraison du certificat d’authenticité”, explique-t-il avec un petit sourire coupable.

 Je t’avais dit que j’avais fait mes recherches. Léa ne sait plus quoi penser. Ce homme qu’elle connaissait à peine il y a quelques heures vient de bouleverser sa soirée, de lui offrir une revanche inespérée sur ses détracteurs et maintenant elle découvre qu’il s’intéresse à son travail depuis des mois.

 Pourquoi ? Demande-t-elle alors qu’il s’engage boulevard Voltaire. Pourquoi avoir inventé ce mensonge ? Tu aurais pu simplement dire que tu me connaissais, que tu appréciais mon travail. Julien se garde devant l’immeuble de Léa et coupe le moteur. Dans le silence soudain, on n’entend plus que le bruit lointain de la circulation et les battements accélérés du cœur de Léa parce que ça ne leur aurait pas fermé le clapet aussi efficacement, dit-il avec un sourire en coin.

 Et puis il hésite comme s’il pesait ses mots. J’en avais assez qu’on me présente des héritières insipides à chaque soirée mondaine. Le mensonge de ce soir me donne un répi bienvenu. Donc, je suis ton parfeu social en quelque sorte. Il se tourne vers elle et dans ses yeux bleus, Léa lit quelque chose qu’elle n’arrive pas à déchiffrer.

 Mais si tu acceptes, j’aimerais que ce soit plus que ça. Le cœur de Léa fait est un bon. Comment ça ? J’aimerais qu’on apprenne à se connaître vraiment. Pas comme les personnages qu’on a joué ce soir, mais comme nous-mêmes. Julien et Léa sans les masques, sans les préjugés, sans les différences de classe.

 Il se penche légèrement vers elle et Léa sans son parfum l’envelopper à nouveau. Ce soir, j’ai découvert une femme courageuse, intelligente, authentique. J’ai envie d’en savoir plus. Léa sans sa tête tournée. Tout va trop vite. C’est trop inattendu, trop parfait pour être vrai. Julien, nous ne venons pas du même monde. Ce soir, c’était du théâtre, mais dans la vraie vie.

 Dans la vraie vie, je suis un homme qui travaille trop, qui mange souvent seul dans des restaurants étoilés sans avoir personne avec qui partager les moments importants. Sa voix se fait plus grave, plus sincère. Et tu es une femme qui se bat pour ses rêves, qui a gardé son âme d’artiste malgré les difficultés. Nous avons peut-être plus de points commun que tu ne le crois.

 Il sort de sa poche une carte de visite en carton épais gravée en relief. Mon numéro personnel, si tu as envie de continuer cette conversation ou si tu as besoin de quoi que ce soit. Après ce qui s’est passé ce soir, Amélie et sa bande vont probablement vérifier nos dir. Il faudra qu’on soit crédible. Léa prend la carte, ses doigts effleurant brièvement ceux de Julien. Tu penses à tout.

Habitude professionnelle. Il sourit mais son regard reste sérieux. Léa, merci pour ce soir. Tu as joué le jeu parfaitement. J’espère que ça t’a fait du bien de les voir ravaler leur sarcasme plus que tu ne l’imagines avoue-elle en ouvrant la portière. Mais maintenant, il faut que j’y aille. J’ouvre le café à 7h demain matin.

 Bien sûr. Il contourne la voiture pour l’accompagner jusqu’à la porte de l’immeuble. Un geste de galanterie naturelle qui ne passe pas inaperçu. Bonne nuit, Léa. Bonne nuit. Marie, il éclate de rire, un rire franc et chaleureux qui raisonne dans la rue déserte. À très bientôt, épouse.

 Léa le regarde repartir depuis sa fenêtre du 5è étage. L’Aston Martin disparaît dans la nuit parisienne en portant avec elle la soirée la plus surréaliste de sa vie. Elle s’assoit sur son lit, la carte de visite à la main et tente de faire le point sur ce qui vient de lui arriver. Dans quelques heures, elle reprendra sa routine. Réveil à 6h, café chez Margaot.

Sourires aux clients, économie sous par sous pour ses projets artistiques. Mais quelque chose a changé ce soir, quelque chose d’indéfinissable, comme si l’univers avait brusquement décidé de lui ouvrir une porte qu’elle n’avait jamais osé espérer. Son téléphone vibre. Un message de Julien.

 Dors bien, Léa et merci encore pour cette soirée extraordinaire. Elle sourit malgré elle et tape sa réponse. Merci à toi. Demain retour dans le monde réel. Sa réponse arrive aussitôt. Et si le monde réel pouvait être aussi beau que cette soirée ? Léa éteint son téléphone sans répondre, mais le sourire ne quitte plus ses lèvres jusqu’à ce qu’elle s’endorme. Le réveil sonne à 6h comme tous les matins, mais Léa met plusieurs secondes à émerger.

 Les événements de la veille lui reviennent par fragment. Le palace, Amélie, Julien qui la revendique comme sa femme, la voiture de luxe, leurs mains qui se frôlent. Pendant un instant, allongée dans son lit étroit, elle se demande si elle n’a pas tout rêvé. Puis elle aperçoit la carte de visite sur sa table de nuit et la réalité la rattrape.

 Julien Baumont, président directeur général, groupe Baumont international gravé en lettrre dorée sur carton ivoir. Non, elle n’a pas rêvé. Sous la douche de sa minuscule salle de bain, Léa tente de remettre de l’ordre dans ses pensées. Hier soir, elle était madame Baumont, épouse d’un des hommes les plus riches de Paris.

 Ce matin, elle redevient Léa Morau, serveuse au café de Margaot, locataire d’un studio de 25 m². Quelle peine a chauffer correctement. Le contraste est saisissant, presque douloureux. À 7 he moins le quart, elle pousse la porte vitrée de chez Margaot. L’odeur familière du café fraîchement moulu et des croissants qui sortent du four la réconforte. C’est son univers, celui qu’elle maîtrise où elle a sa place.

Alors Margaot lève les yeux de sa machine à café. Un sourire complice aux lèvres. Ces fameuses retrouvailles. Tu es rentré tard hier soir. J’ai vu de la lumière chez toi jusqu’à minuit passer. Léa noue son tablier en réfléchissant à ce qu’elle peut dire sans mentir complètement. C’était instructif. Mes anciens camarades ont bien réussi.

professionnellement. Et toi, tu leur as dit quoi ? Que tu étais une artiste talentueuse qui finance sa passion par ses propres moyens. Quelque chose dans ce genre, répond Léa en évitant le regard perspicace de sa patronne. La matinée passe dans le rythme habituel. Café croissant pour monsieur Dubois, thé vert pour madame Chen.

 Cappuccino à emporter pour les cadres pressés du quartier. Vers 10 heures pendant la calmie, Léa vérifie machinalement son téléphone. Messages WhatsApp. Son cœur fait un bon. Elle qui ne reçoit d’habitude que des messages de sa banque pour lui signaler son découvert autorisé. Le premier est d’Amélie. Léa, je n’arrive toujours pas à y croire. Julien Baumont, appelle-moi, j’ai 1000 questions.

 Le deuxième de Sophie, il faut absolument qu’on se voit. Je veux tout savoir sur ton mariage secret. Les autres sont du même Acabi, mélange de curiosité dévorante et de flagornerie soudaine. Léa ressent un malaise grandissant. Ces mêmes personnes qui la méprisaient hier soir lui font maintenant du charme.

 Elle s’apprête à ranger son téléphone quand un nouveau message arrive. Le nom qui s’affiche lui fait accélérer le pou. Julien. Bonjour Léa. J’espère que tu as bien dormi. J’ai une proposition à te faire. Peux-tu m’appeler quand tu auras un moment. Julien. Léa regarde autour d’elle. Le café est presque vide. Margaot fait ses comptes dans l’arrière boutique. Elle compose le numéro. Le cœur battant.

 Léa, la voix de Julien, grave et chaleureuse, lui fait le même effet que la veille. Merci de m’appeler si vite. De rien, tu as dit que tu avais une proposition. En effet, j’ai réfléchi cette nuit à notre situation.

 Si nous voulons que notre mariage fictif soit crédible, il faudrait que nous soyons vus ensemble de temps en temps. Léa, sans son estomac se nouer. Tu veux dire comme de vrai marier ? Exactement. Dîner, sorties, événements sociaux. Rien d’intime bien sûr, précise-t-il rapidement, juste assez pour alimenter les ragot et maintenir l’illusion.

 Je vois laa s’appuie contre le comptoir partagé entre excitation et appréhension. Et qu’est-ce que j’y gagnerais ? Plusieurs choses. D’abord, cela te donnerait accès à un réseau artistique que tu n’imagines même pas. Mes relations dans le milieu culturel pourraient t’ouvrir des portes. Ensuite, il marque une pause. J’aimerais te proposer un contrat d’artiste exclusive. Léa manque de lâcher son téléphone.

 Un contrat ? J’ai plusieurs propriétés qui auraient besoin d’œuvres d’art original. Hôtel, bureau, résidences privées. Si tu acceptes de créer pour moi, je suis prêt à te verser un avaloir confortable qui te permettrait d’arrêter le café et de te consacrer entièrement à ta passion. La proposition est si inattendue, si généreuse que Léa en a le vertige.

Julien, c’est c’est énorme, mais je ne veux pas de ta charité. Ce ne serait pas de la charité”, répond-t-il fermement. “J’ai vu ton travail, je connais ton talent. Ce serait un investissement artistique rentable pour mes affaires et une opportunité professionnelle pour toi. Win win !” comme on dit.

 Margaot sort de l’arrière boutique et lève un sourcil interrogateur en voyant Léa au téléphone. Celle-ci lui fait signe qu’elle en a pour 2 minutes. “Je besoin de réfléchir”, dit-elle à Julien. “Bien sûr, prends le temps qu’il faut.

 En attendant, accepterais-tu de déjeuner avec moi aujourd’hui ? Nous pourrions discuter des détails et apprendre à nous connaître. Comme je te l’ai dit hier soir, Léa regarde l’horloge 11h. Elle finit à 14h. Je termine le service à 2h. Parfait. Je passerai te prendre au café à 14h15. Tenue décontractée. Nous irons quelque part de simple. D’accord. Elle raccroche. Le souffle court. Alors Margaot s’approche les yeux pétillants de curiosité.

 C’était qui ? Tu as l’air toute retourné. Un client potentiel pour mes dessins. Ah bon ? Et il propose quoi ? Léa ne peut pas lui dire la vérité, du moins, pas toute la vérité. Une commande importante, plusieurs œuvres pour décorer des espaces professionnels. Ça, c’est une bonne nouvelle. Tu vois que ton talent finit par payer et il te propose combien ? On On doit encore en discuter. Il m’invite à déjeuner pour parler à faire. Margaot fronç les sourcils. Fais attention, ma petite.

 Les hommes d’affaires qui invitent les jolies filles à déjeuner n’ont pas toujours que l’art en tête. Si elle savait, pense Léa en rougissant. Ne t’inquiète pas, je saurai me défendre. Le reste du service passe dans une sorte de brouillard. Léa sert ses clients habitués machinalement, l’esprit ailleurs.

 À 14h tapante, elle accroche son tablier et file dans les toilettes pour se refaire une beauté. Dans le petit miroir fêlé, elle examine son reflet. Cheveux chatins attachés en queue de cheval, léger maquillage, chemise blanche et jeans noir. Simple mais soigné. Elle espère que c’est ce que Julien entendait par tenue décontractée. À 14h15 précise, l’aston Martin Grise se gare devant le café.

Plusieurs passants s’arrêtent pour admirer la voiture et Léa sent tous les regards convergés vers elle quand elle monte côté passager. “Bonjour !” dit Julien avec un sourire qui lui fait oublier instantanément son track. Il porte un pull en cachire bleu marine et un pantalon de toile beige.

 Même habillé simplement, il dégage cette élégance naturelle des gens habitués au raffinement. Bonjour. Alors, où m’emmènes-tu ? Surprise ! Il démarre et s’engage dans la circulation parisienne. Comment s’est passé ta matinée ? Margaot va bien ? Très bien, elle te passe encore le bonjour. Léa ne peut s’empêcher de sourire.

 Tu sais qu’elle commence à être curieuse de te rencontrer après que je lui ai dit qu’un client mystérieux m’avait proposé une grosse commande. Ah ! Julien négocie un carrefour avec habileté. Il va falloir qu’on pefine notre histoire. Au fait, j’ai eu des nouvelles de nos amis d’hier soir. Déjà, Amélie m’a envoyé trois messages depuis ce matin. Elle veut organiser un dîner pour fêter notre union.

 J’ai décliné poliment en disant que nous préférions rester discrets encore quelques temps. Léa imagine sans peine l’insistance d’Amélie. Elle ne va pas lâcher l’affaire facilement. C’est pour ça qu’il faut qu’on soit prêt d’où ce déjeuner. Il remonte le boulevard Saint-Germain, traverse le 6e arrondissement et s’arrête finalement devant un petit bistro de la rue de Bussi. Le Procope annonce l’enseigne discrète.

 Le plus vieux café de Paris”, explique Julien en sortant de voiture. Voltaire, Rousseau, Balza qui venait. “J’ai pensé que ça te plairait.” Léa est touché par l’attention. Il a choisi un lieu chargé d’histoire littéraire plutôt qu’un restaurant étoilé, quelque chose qui parle à son âme d’artiste. L’intérieur du Procope est exactement ce que Léa imaginait.

 poutres apparentes, banquettes en velours rouge, portraits d’écrivains au mur et cette atmosphère feutrée des lieux qui ont traversé les siècles sans perdre leur âme. Le maître d’hôtel reconnaît visiblement Julien et les installe à une table discrète près d’une fenêtre donnant sur la rue pavé.

 Léa observe son compagnon étudiait la carte avec sérieux et réalise qu’elle ne sait finalement presque rien de lui. Alors dit-elle après qu’ils ont commandé, coque au vin pour elle, sol menière pour lui. Raconte-moi, qu’est-ce qui t’a amené à reprendre l’empire familial ? Au lycée, tu semblais plutôt fait pour être professeur ou chercheur. Julien sourit en dépilant sa serviette. Bonne mémoire.

 C’est vrai, j’aurais aimé enseigner la littérature, mais quand mon père a eu son infarctus il y a cinq ans, quelqu’un devait prendre le relais. Tu as sacrifier tes rêves pour la famille ? Disons que j’ai appris à trouver du sens ailleurs. Diriger une entreprise, c’est aussi une forme de création. Et puis, le groupe Baumont emploie 12ze000 personnes.

 C’est une responsabilité que je ne prends pas à la légère. Léa l’écoute, fasciné par cette facette sérieuse qu’elle découvre. Tu ne regrettes jamais. Parfois, il boit une gorgée de vin blanc. Et toi, pourquoi avoir arrêté tes études d’art après le bac ? C’est autour de Léa de se sentir vulnérable. Quand mes parents sont morts, j’ai dû gérer les dettes, vendre la maison familiale, trouver un travail rapidement.

 Les beaux, c’était un luxe que je ne pouvais plus m’offrir mais tu as continué à créer. Le soir, les weekends, c’était vital pour moi. Sans l’art, je pense que je serais devenue folle de chagrin. Julien la regarde intensément et elle lit de la compassion dans ses yeux bleus.

 C’est pour ça que j’aimerais t’aider, pas par pitié, mais parce que je sais reconnaître un talent quand j’en vois un et parce que il hésite. Parce que hier soir, j’ai eu l’impression de retrouver une partie de moi que j’avais enfui. Comment ça ? L’authenticité, la spontanéité. Avec toi, je ne suis pas le PDG Baumont ou l’héritier qu’il faut séduire. Je suis juste Julien. Leur place arrivent, interrompant ce moment d’intimité naissante.

 Ils mangent en parlant de tout et de rien. Ses voyages d’affaires à lui, ses projets artistiques à elle, leur goût commun pour les vieux films français et la littérature du 19e siècle. Au fait, dit Julien en reposant sa fourchette, j’ai apporté quelque chose. Il sort de sa veste une enveloppe craft. Le contrat dont je t’ai parlé ce matin.

 Tu peux le lire tranquillement chez toi, mais voici les grandes lignes. Commande exclusive d’une vingtaine d’œuvres sur ans, sujet libre mais dans l’esprit de ton travail actuel. 15000 € d’avaloir, des signatures puis paiement à la livraison de chaque œuvre. Léa failli s’étrangler avec sa bouchée de coque au vin. 15000 €.

 C’est en dessous du marché pour ce type de commande, précise Julien rapidement. Mais comme c’est ton premier gros contrat, Julien sait plus que ce que je gagne en un an au café. Justement, cela te permettrait de donner ta démission et de te consacrer entièrement à la peinture.

 Tu pourrais même reprendre des cours, si tu veux, au beauard ou dans une école privée. Léa fixe l’enveloppe comme si elle contenait de la dynamite. Et en échange, je joue ta femme dans les événements mondains si tu acceptes. Oui, rien de contraignant. Quelques dîners, peut-être un galat de charité ou deux.

 Nous pourrions même prétendre divorcer à l’amiable dans un an si cette comédie te pèse. Un faux mariage avec date d’expiration. Léa ne sait pas si elle doit rire ou pleurer. C’est surréaliste. Mais ça pourrait marcher. Tu aurais un an de liberté totale pour créer. Moi, j’échapperai aux tentatives de mariage arrangé de ma mère et nous pourrions, il s’interrom.

 Nous pourrions quoi ? Voir si cette complicité d’hier soir peut devenir quelque chose de plus réel. Le cœur de Léaf est un bon. Tu veux dire, tu penses à une vraie relation ? Je ne sais pas, avoue Julien avec une sincérité désarmante. Tout ce que je sais, c’est que j’ai passé la nuit à repenser à notre conversation dans la voiture, à la façon dont tu as relevé le menton face à Amélie, à ton sourire quand tu as dit “Bonne nuit, Marie”. Léa sans ses joues sans pourprès.

 Julien, je ne te demande pas de réponse maintenant. Lis le contrat, réfléchis à ma proposition. Nous sommes deux adultes intelligents. Nous pouvons sûrement trouver un arrangement qui nous convient à tous les deux. Il fait signe au serveur d’apporter l’addition, met à cette conversation qui laisse Léa plus troublée qu’elle ne l’était en arrivant.

“Je te ramène au café”, propose-t-il en se levant. “Non merci, j’ai besoin de marcher, de réfléchir. Ils sortent ensemble dans la rue de Bussi. L’après-midi parisien est doux pour un mois de novembre et les terrasses des cafés alentours commencent à se remplir. Léa ! Julien lui prend doucement la main.

 Quoi que tu décides, merci pour hier soir et pour aujourd’hui. Cela faisait longtemps que je n’avais pas passé un déjeuner aussi agréable. Moi aussi, avoue-elle. Il porte sa main à ses lèvres et y dépose un baiser léger, galant qui lui fait l’effet d’une décharge électrique. À bientôt, j’espère. Léa le regarde s’éloigner vers sa voiture, l’enveloppe serrée contre sa poitrine.

 Autour d’elle, Paris continue sa vie. Touriste qui photographi les façades anciennes, étudiants qui sortent des librairies les bras chargés de livres, couple qui flanent main dans la main. Mais pour elle, quelque chose à basculer. Dans cette enveloppe, il y a peut-être la clé d’une nouvelle vie.

 Reste à savoir si elle a le courage de la saisir. Elle rentre chez elle à pied, empruntant les quai de scène puis remontant vers République. Les 15000 € pourraient changer sa vie. Fini les fins de mois difficiles. Fini les nuits blanches à se demander comment payer le loyer. Fini les rêves différés, faute de moyens.

 Mais accepter, c’est aussi entrer dans un monde qu’elle ne maîtrise pas, jouer un rôle dont elle ne connaît pas toutes les règles. Et c’est surtout prendre le risque de tomber amoureuse d’un homme qui lui ne fait peut-être que jouer. Léa passe la soirée assise sur son lit. Le contrat est allé devant elle. Les termes sont clairs, généreux, presque trop beaux pour être vrai.

 20 œuvres en 2 ans, thème libre, quizeux d’avance. Elle a relu chaque clause trois fois, cherchant le piège, la contrepartie cachée, mais il n’y en a pas. Le contrat est d’une honnêteté déconcertante. Julien achète son talent d’artiste. Point final. Les obligations mondaines ne sont même pas mentionnées officiellement.

 À minuit, n’arrivant pas à dormir, elle appelle sa meilleure amie Clara, partie vivre à Lyon après ses études de droit. Tu plaisantes ? Clara manque de s’étrangler avec sa tisane. Un contrat de quinze, Léa, c’est inespéré. Tu signes quand ? Ce n’est pas si simple, soupire Léa en se pelotonnant sous sa couette. L’homme qui me propose ça, c’est compliqué.

 Compliqué ? Comment ? Il est marié ? Trop vieux ? Trop jeune ? Non, il est parfait. Justement, trop parfait. Et il me demande de faire semblant d’être sa femme en public. Un silence. Puis Clara éclate de rire. Attends, tu me fais une Pretty Woman version parisienne. Mais c’est génial. Clara, sois sérieuse. Mais je le suis. Réfléchis de secondes. Tu n’as rien à perdre et tout à gagner.

 Si ça se passe mal, tu auras au moins eu 15000 € pour recommencer ailleurs. Et si ça se passe bien ? Si ça se passe bien, je tombe amoureuse d’un homme qui ne me voit peut-être que comme une employée sophistiquée ou alors il tombe amoureux de toi pour de vrai. Léa, tu ne peux pas passer ta vie à avoir peur. Tes parents n’auraient pas voulu ça pour toi. Cette dernière phrase fait mouche.

 Léa repense à sa mère, institutrice passionnée qui l’encourageait toujours à saisir sa chance quand elle passe à son père employé municipal qui économisait sous par sous pour lui payer des cours de dessin le mercredi après-midi. Tu as raison”, murmuret-elle. “J’ai peur, mais tu as raison.” Après avoir accroché, elle prend une feuille blanche et écrit une lettre de démission sobre et digne pour Margaot.

 Puis elle signe le contrat d’une main ferme avant de changer d’avis. Le lendemain matin, elle arrive au café avec une boule au ventre. Comment annoncer à Margaot qu’elle la quitte ? Cette femme qui l’a embauché sans expérience, qui l’a soutenu dans les moments difficiles, qui est devenue une figure maternelle de substitution.

 Tu as l’air bizarre, remarque Margaot en la voyant arriver. Ça ne va pas ? Si si, enfin, il faut que je te parle. Marga pose sa serpiguière et s’essuit les mains sur son tablier. Ça concerne ton client d’hier, celui qui t’a proposé la commande ? Oui, il il veut que je travaille exclusivement pour lui pendant 2 ans.

 Exclusivement ? Margaot fronce les sourcils. Qu’est-ce que tu veux dire ? Léa sort la lettre de démission de sa poche, les mains tremblantes. Je dois arrêter le café Margaot. Il me propose assez d’argent pour que je puisse me consacrer entièrement à la peinture. Le visage de Margaot se ferme. Combien ? 15000 € d’avance.

 Margaot siffle entre ses dents. Ça, c’est de l’argent. Et tu lui fais confiance à ce client mystérieux ? Je je crois oui Léa, regarde-moi. Margaot lui prend les mains. Tu es comme la fille que je n’ai jamais eu. Alors, je vais te dire le fond de ma pensée. Ou bien cet homme est vraiment convaincu par ton talent ou bien il a d’autres intentions.

 Dans les deux cas, c’est une chance à saisir. Tu ne m’en veux pas de te laisser tomber, ma petite fille, tu ne me laisses pas tomber. Tu saisis ta chance. C’est ce que j’aurais fait à ton âge. Margaot l’embrasse sur les deux joues. Et si ça ne marche pas, tu sais où me trouver. Léa sent les larmes lui monter aux yeux. Merci Margaot pour tout. Allez va.

 Fa appeler ton mess et dis-lui que tu acceptes. Mais fais-toi respecter hein. Tu vaux plus que tu ne le crois. À 11h, Léa compose le numéro de Julien d’une main qui tremble légèrement. Léa il décroche à la première sonnerie comme s’il attendait son appel. J’accepte, dit-elle simplement.

 Un silence puis tu acceptes tout, le contrat et le reste tout à condition qu’on établisse des règles claires. Bien sûr, tu peux passer à mon bureau cet après-midi. Nous signerons officiellement et nous discuterons des détails pratiques. Léa n’a jamais mis les pieds dans un bureau de PDG. L’immeuble Baumont avenue Montaigne est un bijou d’architecture contemporaine mêlé à l’osmanien classique.

 Le hall d’accueil tout en marbre blanc et acier brossé l’impressionne déjà. Mademoiselle Morau, une assistante impeccable en tailleur noir l’accueille. Monsieur Baumont vous attend. Dernier étage. L’ascenseur silencieux l’amène au 15e étage où les ba vitrées offrent une vue panoramique sur Paris.

 Le bureau de Julien est à l’image de l’homme, élégant sans ostentation. fonctionnel mais chaleureux. Et là, accroché derrière son fauteuil de direction, elle reconnaît son dessin de la dame du métro. “Tu l’as vraiment fait encadré”, murmure-elle ému. Julien se lève et contourne son bureau. Il me donne de l’inspiration tous les matins.

 Cette femme a l’air si sereine, si en paix avec elle-même. “C’est exactement ce que j’ai voulu saisir.” “Tu as réussi !” Il lui désigne un fauteuil face au sien. Alors ces fameuses règles. Léa sort un papier de son sac. Elle a passé une partie de la nuit à lister ses conditions. D’abord pas de mensonge à Margaot. Elle sait déjà que tu me proposes un contrat artistique. Je ne veux pas lui mentir sur le reste. D’accord.

 Qu’est-ce qu’on lui dit exactement ? Qu’on se connaissait au lycée, qu’on s’est retrouvé par hasard et qu’une relation est en train de naître. Ce n’est pas complètement faux. Après tout, Julien sourit effectivement. Ensuite, pas plus de deux sorties mondaines par mois. Je ne suis pas habitué à ce milieu. Il faut que j’apprenne progressivement. Raisonnable.

Continue. Pas de démonstration d’affection excessive en public. Des gestes tendres, oui, mais rien qui me mette mal à l’aise. Bien sûr, autre chose. Léa hésite sur le dernier point, le plus personnel. Si l’un de nous deux Si l’un de nous développe des sentiments réels, il doit le dire à l’autre pour éviter les malentendus.

 Julien la regarde intensément. Tu penses que c’est possible ? Je pense que nous ne sommes pas des robots. Jouer l’intimité peut créer de vraie intimité. Et si ça arrive, on avisera. Léa range son papier. Ces conditions te conviennent ? Parfaitement. Julien ouvre un tiroir et en sort deux contrats identiques.

 Alors signons officiellement madame Baumont. Le nom l’a fait frissonner. Dans quelques secondes, elle ne sera plus seulement Léa Morau, serveuse de café, mais l’artiste exclusive du groupe Baumont et pour le monde extérieur, l’épouse de l’un des hommes les plus influents de Paris. Elle signe d’une main ferme et Julien en fait autant.

Puis il lui tend un chèque 15000 € comme convenu. J’ai également fait préparer ceci. Il lui donne une carte de crédit dorée à son nom pour tes achats personnels liés à notre arrangement. vêtements pour les soirées, coiffeur, tout ce dont tu auras besoin pour être crédible dans mon milieu. Léa fixe la carte stupéfaite. Julien, c’est trop.

Non, c’est logique. Je ne peux pas t’emmener dans des galas de charité à mille eur couvert avec une robe de frer même si tu es magnifique dedans. Le compliment l’a fait rougir. Je ne sais pas comment te remercier. En créant de belles œuvres et en étant heureuse, il se lève et contourne à nouveau le bureau.

 Léa, je veux que tu saches quelque chose. Quoi qu’il advienne entre nous, ce contrat tient. Même si notre arrangement social ne fonctionnait pas, tu resterais mon artiste exclusive. Pourquoi tu me dis ça ? Pour que tu ne te sentes jamais redevable au-delà de ton travail artistique. Tu as du talent, je veux l’encourager.

 Le reste, on verra bien. 3 jours plus tard, Léa se trouve dans la boutique Sandro des Champs-Élysées, complètement dépassé par le choix et les prix. La vendeuse, une jeune femme blonde au sourire professionnel, étale devant elle des robes qui coûtent plus cher que son ancien salaire mensuel.

 “Pour quelle occasion, madame ?” demande-telle en déployant une robe noire élégante. Un dîner d’affaires dans un restaurant gastronomique, répond Léa en essayant de masquer son stress. Elle a rendez-vous avec Julien le soir même chez Laerre, restaurant étoilé de l’avenue Franklin Roosevelt. Histoire de nous entraîner”, a-t-il dit au téléphone et de célébrer notre nouveau partenariat.

 La carte de crédit doré dans son portefeuille lui brûle les doigts. Elle n’a jamais eu autant d’argent à sa disposition et cela l’angoisse autant que cela l’excite. “Celle-ci vous irait à merveille”, suggère la vendeuse en montrant une robe bleu marine cintrée. Elle met en valeur votre silhouette et reste sobre pour les affaires. Léa la robe dans la cabine.

 Le tissu est d’une douceur incroyable, la coupe impeccable. Dans le miroir, elle se reconnaît à peine. Cette femme élégante peut-elle vraiment être elle ? Parfait ! S’exclame la vendeuse quand elle sort de la cabine. Il vous faut des escarpins assortis et un petit sac.

 Deux heures plus tard, Léa ressort de sa séance shopping avec trois tenues complètes, des chaussures, des accessoires et un sentiment de culpabilité énorme. Elle a dépensé plus en un après-midi que durant toute l’année précédente. De retour dans son studio, elle étale ses achats sur le lit.

 Les vêtements paraissent incongrus dans ce décor modeste comme des costumes de théâtre en attente d’une représentation. Son téléphone sonne. Clara. Alors, comment ça se passe ta nouvelle vie de bourgeoise ? Je ne suis pas bourgeoise, proteste Léa en montrant ses achats à son ami par vidéo. Regarde ça, Clara, je ne me reconnais plus. Tu es magnifique et cette robe bleue te va à merveille.

 Ton prince charmant va être sous le charme. Ce n’est pas mon prince charmant, c’est mon employeur. Employeur qui t’achète des robes à 500 € et t’emmène dans les plus grands restaurants de Paris. Léa, réveille-toi. Peut-être Clara a-t-elle raison. Peut-être Léa se voile-telle la face par peur d’y croire vraiment. À dix heures, elle se prépare avec un soin méticuleux.

Douche, brushing qu’elle a appris grâce à YouTube. Maquillage plus sophistiqué qu’à l’ordinaire. La robe bleue l’embrasse parfaitement. Les escarpins allongent ses jambes. Dans le miroir de sa salle de bain, elle voit une femme qu’elle ne connaît pas. Sûre d’elle, élégante, séduisante, l’Aston Martin l’attend devant l’immeuble à vinte heures précise.

 Julien, dans un costume grisite, la dévore du regard quand elle monte en voiture. “Tu es éblouissante”, dit-il simplement. “Merci, toi aussi, tu es très élégant. Le trajet jusqu’au restaurant se fait dans une atmosphère étrange, chargé d’une tension nouvelle. Quelque chose a changé depuis leur déjeuner au Procope. Ils ne sont plus deux inconnus qui apprennent à se connaître, mais deux partenaires qui s’apprêtent à jouer une comédie ou à vivre une réalité.

 La serre, avec son toit ouvrant et sa décoration belle époque impressionne Léa dès l’entrée. Le maître d’hôtel accueille Julien comme un habitué et les conduit à une table intimement éclairée aux chandelles. Bonsoir, monsieur Baumont, madame, votre table habituelle vous convient-elle ? Parfaitement, Michel. Merci.

 Une fois installé, Léa Chuchote, ta table habituelle. Je viens ici pour les dîners d’affaires importants, mais c’est la première fois que j’y emmène quelqu’un qui compte vraiment. Le compliment la trouble. Julien, pardon, je ne voulais pas rendre les choses plus compliquées. Il ouvre la carte des vins, un champagne pour fêter notre association.

 Le dîner se déroule dans une atmosphère de plus en plus détendue. Il parle de tout. Voyages, livres, projets artistiques de Léa. Julien se révèle un convive attentif, cultivé, spirituel, loin de l’image du businessman froid qu’elle imaginait. “Au fait, dit-il en attaquant son soufflet au grand barnier.

 J’ai une proposition à te faire. Encore une ?” Léa, tu n’arrêtes pas ? Celle-ci est différente. J’aimerais t’inviter à passer le weekend dans ma maison de Normandie d’uville pour que tu puisses commencer à travailler dans de bonnes conditions. Léa manque de s’étrangler avec sa cuillérée de soufflet. Un weekend ensemble, chambre séparée bien sûr, précise-t-il rapidement.

 Mais la lumière là-bas est magnifique, parfaite pour peindre. Et puis nous devons apprendre à nous connaître si nous voulons être crédible en couple. Je ne sais pas Julien, passer un weekend ensemble c’est intime. Nous serons charenés par madame du bois la gouvernante et par mon chien Balzac, un golden retriever qui ne me quitte jamais. Malgré son appréhension, Léa sent l’excitation montée.

 Peindre face à la mer dans une vraie maison avec de vrais ateliers, c’est le rêve de toute sa vie d’artiste. D’accord, dit-elle finalement. Mais je te préviens, je ne sais pas monter à cheval ni jouer au tennis. Je ne connais rien au code de la bourgeoisie normande. Tu n’auras pas besoin de jouer un rôle là-bas, juste d’être toi-même.

 En sortant du restaurant, il tombe nez à nez avec Amélie et Thomas, visiblement en tête à tête romantique. Le visage d’Amélie s’éclaire d’une joie mauvaise en les apercevant. Léa, Julien, quelle surprise ! Elle embrasse Léa avec une effusion feinte. Vous étiez en amoureux à la serre. Comme c’est romantique. Bonsoir Amélie ! Répond Julien poliment.

 Thomas, passez une excellente soirée. Il pose sa main sur les reins de Léa, un geste possessif et protecteur qui n’échappe pas aux deux fouiners. Il faut absolument qu’on se revoit bientôt, insiste Amélie. J’organise une petite soirée samedi prochain. Vous viendrez.

 Nous serons en Normandie, répond Léa avant que Julien ait pu intervenir dans la maison de famille. L’effet est immédiat. Les yeux d’Amélie s’arrondissent. Être invité dans la propriété familiale des beaumonts, c’est un signe de sérieux dans une relation. “Oh, fait-elle simplement, comme c’est charmant.” Dans la voiture. En repartant, Julien éclate de rire.

 “Tu as vu sa tête ? Je crois qu’on peut dire que notre crédibilité est établie. J’ai parlé trop vite. Au contraire, tu as été parfaite.” Il lui prend la main par-dessus le levier de vitesse. “Léa, ce qui se passe entre nous, ce n’est plus seulement de la comédie, n’est-ce pas ? Le regard de leurs mains enlacées trouble par la chaleur de ses doigts contre les siens. Non, avoue-elle, ce n’est plus seulement de la comédie.

 Le vendredi soir, Julien vient chercher Léa avec un SUV Range Rover plutôt qu’avec l’Aston Martin habituel. “Plus pratique pour transporter tes affaires de peinture”, explique-t-il en l’aidant à charger son matériel artistique dans le coffre spacieux. Léa a emballé ses pinceaux, ses toiles, ses tubes de peinture avec un soin méticuleux.

 C’est la première fois qu’elle va pouvoir créer dans un vrai atelier avec de la place et une belle lumière naturelle. L’excitation le dispute à l’appréhension. Passer un weekend entier avec Julien dans l’intimité d’une maison familiale, c’est franchir un cap important dans leur étrange relation.

 “Nervé !” demande-t-il en s’engageant sur l’autoroute à 13, direction Quamp. “Un peu,” avou Léa. “Et si ta gouvernante me trouve bizarre ? Et si je ne suis pas à la hauteur de ce cadre bourgeois ?” Julien lui jette un regard amusé. Madame du Bois a sovaille pour ma famille depuis 40 ans.

 Elle a vu défiler toutes mes petites amies et je peux te garantir qu’elle préférera ton authenticité aux mina héritières qu’on m’a présenté. Toutes tes petites amies ? Léa ne peut s’empêcher de poser la question qui la tare. Il y en a eu beaucoup, quelques-unes. Rien de très sérieux. Il hésite. Et toi ? Un grand amour dans ta vie. Mathieu, on a vécu ensemble pendant trois ans. Ça s’est terminé il y a deux ans.

 Qu’est-ce qui s’est passé ? Léa regarde défiler le paysage normand par la vitre. Il n’a pas supporté que je refuse d’abandonner l’art pour prendre un vrai travail dans l’administration. Il disait que mes rêves d’artistes nous empêchaient d’avancer. Un imbécile, commente Julien sobrement. Peut-être ou peut-être qu’il était juste réaliste. À l’époque mes toiles ne se vendaient pas.

Je peenais à payer ma part du loyer. L’art n’est pas un passe-tempilier, Léa. Ça est une nécessité humaine. Si Mathieu ne l’a pas compris, c’est effectivement un imbécile. La veémence dans sa voix surprend Léa. Tu défends l’art avec passion pour quelqu’un qui a abandonné ses rêves de littérature.

 Justement, je sais ce que ça coûte d’y renoncer. Ils arrivent à Doville alors que le soleil couchant embrase la mer. La maison de Julien n’est pas le château qu’imaginait Léa, mais une élégante demeure normande duème siècle avec ses colombages, ses volets bleus et ses massifs de rose même en cette saison tardive.

 Monsieur Julien, une femme aux cheveux blancs tirée en chignon, sort de la maison, suivie d’un golden retriever qui bondit vers son maître en agitant frénétiquement la queue. Bonjour madame du bois, voici Léa dont je vous ai parlé. Julien présente Léa avec naturel. Léa, voici celle qui a élevé tous les enfants beaumont et qui continue de me maternel malgré mes 32 ans.

 Madame du Bois examine Léa avec attention mais son regard n’a rien d’hostile. Bonsoir mademoiselle. J’ai préparé votre chambre, celle avec vue sur mer. Monsieur Julien m’a dit que vous étiez artiste. Oui, peintre, répond Léa en caressant Balzac qui réclame des câlins. Parfait.

 La lumière du matin dans l’ancienne serre est magnifique pour peindre. C’est là que travaillait la grand-mère de Julien. Julien prend les bagages pendant que Mame Dubois fait visiter la maison à Léa. L’intérieur mélange harmonieusement meubles anciens et confort modernes. Des livres partout, des tableaux de paysage normands, des photos de famille. Une cheminée où crépite déjà un feu de bois.

 C’est magnifique, souffle Léa. On se sent immédiatement chez soi. C’est exactement les fait recherché, répond Julien en les rejoignant dans le salon. Cette maison a toujours été un refuge pour notre famille, un endroit où on peut enfin être soi-même. La chambre de Léa au premier étage donne effectivement sur la mer.

 Les vagues viennent mourir sur la plage privée en contrebas, créant une mélodie apaisante. La décoration dans les tons blancs et bleus évoque les cabines de plage chic de la belle époque. “Le dîner sera servi dans une heure”, annonce madame du bois. Rien d’officiel ce soir, nous sommes entre nous. Une fois seule, Léa défait sa valise et s’installe.

 Par la fenêtre entrouverte, elle entend Julien jouer avec Balzac dans le jardin et ce son familier domestique lui serrt le cœur. Elle imagine si facilement une vraie vie ici avec lui. Léa ? La voix de Julien depuis le couloir. Tu veux visiter l’atelier avant le dîner ? L’ancienne serre transformée en atelier dépasse toutes ses espérances. La verrière offre une lumière exceptionnelle.

 Même en fin de journée, des chevalets professionnels, un plan de travail spacieux, des rangements pour le matériel, un vrai paradis d’artiste. “Julien, c’est incroyable !” murmure-t-elle en tournant sur elle-même pour admirer l’espace. “Ta grand-mère était peintre”, aquarelliste, très douée, paraît-il.

 Ses œuvres sont accrochées un peu partout dans la maison. Il s’approche d’elle et dans la lumière dorée du couchant, ses yeux paraissent plus bleus que jamais. J’espère que tu te plairas ici. Comment ne pas s’y plaire ? Léa effleur un des chevalets. C’est le rêve de tout artiste. Alors reste, dit-il simplement.

 Elle se tourne vers lui, surprise par le ton de sa voix. Comment ça ? Reste ici. Pas seulement ce weekend. Installe-toi dans cette maison, travaille dans cet atelier. Tu pourrais créer en paix sans les soucis matériels, sans les contraintes de Paris. L’offre est si inattendue que Léa en perd ses mots. Tu me proposes de vivre ici avec toi ? Pourquoi pas ? Nous nous entendons bien.

 Nous avons des affinités et tu aurais des conditions de travail exceptionnelles. Julien Léa s’éloigne de lui troublé. C’est allé très vite. Nous nous connaissons à peine. J’ai l’impression de te connaître depuis toujours. Il fait un pas vers elle. Léa, ce qui se passe entre nous n’est plus de la comédie. Tu l’as dit toi-même hier soir.

 Oui, mais de là à vivre ensemble, nous vivons déjà ensemble d’une certaine façon. Nous partageons un contrat, une complicité, un secret. Pourquoi ne pas partager aussi un quotidien ? Léa sans son cœur s’emballer. Et si ça ne marchait pas, si nous nous rendions compte que nous ne sommes pas compatibles, alors nous redeviendrions partenaire d’affaires simplement.

 Mais j’ai envie d’essayer. Pas toi ? Avant qu’elle puisse répondre, la cloche du dîner raisonne dans la maison. Madame Dubois les appelle depuis la terrasse. On en reparlera dit Julien en lui offrant son bras. En attendant, profitons de ce weekend. Le dîner se déroule dans la véranda sur le jardin.

 Madame du Bois a préparé des spécialités normandes. Coquilles saint-jaques à la crème, canard aux pommes, tarte tâin maison. Léa découvre un Julien différent de celui de Paris, plus détendu, plus spontané. “Raconte-moi ton enfance ici”, demande-t-elle en dégustant sa tarte.

 était merveilleux avec mes parents et ma sœur, course sur la plage avec madame du bois qui nous courait après partie de cache-cache dans le grenier leçon de voile au yacht club de Duville. Son visage s’assombrit légèrement. Tout a changé quand mon père est tombé malade. Plus de temps pour les vacances, plus d’insouciance. Tu regrettes cette époque ? Je regrette surtout de ne plus avoir le temps de venir ici comme avant.

 Cette maison mérite d’être habitée, pas seulement visitée lors de weekends éclairs. Après le dîner, il se promènent sur la plage privée. La lune éclaire les vagues d’un reflet argenté et le bruit de la mer couvre presque leur pas sur le sable. Balzac court devant eux, fou de joie d’être en liberté.

 “C’est magique !” murmure Léa en respirant l’air Yodé. “Je savais que tu aimerais.” Julien ramasse un galet plat et le fait ricocher sur l’eau. Quand j’étais petit, je rêvais d’être marin au long cours, partir à l’aventure, découvrir de nouveaux horizons.

 Qu’est-ce qui t’en a empêché ? La réalité, les responsabilités, l’empire familial à perpétuer. Il se tourne vers elle. Et toi, tu as déjà rêvé d’autre chose que l’art ? Jamais. Depuis toute petite, je savais que je voulais peindre. Mes parents m’ont toujours soutenu dans cette voix. Il serait fier de toi aujourd’hui. Cette phrase dite avec une sincérité évidente touche Léa en plein cœur. Des larmes lui montent aux yeux.

Excuse-moi dit-elle en s’essuyant les yeux. Je n’aurais pas dû. Ne t’excuse pas. Julien la prend dans ses bras spontanément. C’est normal de les pleurer encore. L’amour ne disparaît pas avec la mort. Léa se laisse aller contre son torse, respirant son parfum mêlé à l’odeur de la mer.

 Dans ses bras, elle se sent protégée, comprise, aimée peut-être. Julien, murmuret-elle, oui, merci pour tout, pour m’avoir sauvé l’autre soir, pour le contrat, pour cette maison, pour pour être toi. Il resserre son étreinte et dépose un baiser léger sur ses cheveux. C’est moi qui devrais te remercier. Tu as bouleversé ma vie.

 Il reste ainsi enlacé face à la mer, chacun savourant cette intimité nouvelle et troublante. Le samedi matin, Léa se réveille dans le grand lit douillet de sa chambre normande avec une sensation d’apaisement qu’elle n’avait plus ressenti depuis des mois, par la fenêtre ouverte entre le bruit des vagues, le champ des mouettes et une lumière dorée qui donne envie de peindre immédiatement.

 Elle enfile un jean et un pull en cachire, autre acquisition de sa récente virée shopping et descendre son petit- déjeuner. Dans la cuisine aux poutres apparentes, madame du bois s’affaire déjà, préparant café, viennoiserie et confiture maison. Bonjour ma petite demoiselle. Bien dormie ? Monsieur Julien est parti courir sur la plage avec Balzac.

 Il ne devrait pas tarder. Merveilleusement bien, répond Léa en acceptant une tasse de café fumant. Cette maison a quelque chose d’apaisant. C’est exactement ce que disait madame Baumont, la maman de Monsieur Julien quand elle venait se reposer ici. Paix à son âme. Madame Dubois pose devant Léa un panier de croissant tout chaud.

 Et vous, ma petite, vous comptez rester un peu parmi nous ? La question posée avec la franchise des gens simples surprend Léa. Je Nous n’avons rien décidé encore. H Madame Dubois la regarde avec ses yeux perçants. Monsieur Julien n’a jamais amené personne ici. Vous savez, cette maison, c’est son sanctuaire. S’il vous y invite, c’est que vous comptez pour lui.

 Avant que Léa puisse répondre, Julien fait irruption dans la cuisine, essoufflé et rayonnant de bonne humeur. En tenue de sport, cheveux et bourriffé par le vent marin, il est encore plus séduisant qu’en costume. Bonjour belle dormeuse. Il l’embrasse spontanément sur la joue un geste si naturel qu’elle en frémit. Prête pour ta première séance de peinture face à la mer. Plus que prête.

J’ai déjà repéré plusieurs sujets depuis ma fenêtre. Après le petit- déjeuner, il s’installe dans l’atelier. Léa monte son chevalet face à la baie vitrée pendant que Julien s’installe dans un fauteuil avec un livre prétextant vouloir la regarder travailler. “Tu ne vas pas rester là à m’observer”, proteste-t-elle en préparant sa palette.

 “Je vais être paralysé. Fais comme si je n’étais pas là. Je veux juste profiter de ce moment.” Léa commence par quelques esquisses du paysage marin tentant d’ignorer la présence troublante de Julien. Mais peu à peu, absorbé par son art, elle oublie tout le reste.

 Les couleurs naissent sur sa toile, les bleus changeant de la mer, les blancs mousseux des vagues, les dorés du sable. Incroyable, murmure Julien au bout d’une heure. Léa sursaute, ayant complètement oublié sa présence. Quoi ? Ta façon de travailler ? Tu te transformes complètement quand tu peins. Tu deviens descente. Elle rougit sous le compliment. C’est la passion, je suppose. C’est magnifique à voir.

 Il s’approche pour examiner la toile et le résultat était poustouflant. Tu as saisi quelque chose que mes yeux voient tous les jours sans vraiment le regarder. C’est le rôle de l’artiste, révéler la beauté cachée du monde. Julien la regarde intensément. Tu révèles beaucoup de choses cachées, Léa. L’atmosphère dans l’atelier devient soudain électrique.

 Léa pose ses pinceaux troublé par l’intensité de son regard. Julien ? Oui, ce que tu as dit hier soir sur le fait de vivre ici, tu le pensais vraiment ? Plus que tout, il s’approche d’elle. Léa, j’ai 32 ans, j’ai eu quelques relations, mais jamais je n’ai ressenti ce que je ressens avec toi.

 Et qu’est-ce que tu ressens ? De la paix, du désir, l’envie de construire quelque chose de vrai, de durable. Il lui prend les mains taché de peinture. Je t’aime Léa. Les mots raisonnent dans l’atelier comme une évidence longtemps retenue. Léa sent son cœur s’emballer. Tu m’aimes vraiment ? Vraiment pas l’artiste que j’aide, pas la femme qui joue mon épouse en public, mais toi les amoraux avec tes doutes, tes fellures, ton courage, ton talent.

 Léa sans les larmes lui monter aux yeux. “Moi aussi je t’aime”, avoue-elle dans un souffle. Julien la prend dans ses bras et l’embrasse avec une tendresse infinie. C’est leur premier vrai baisé, sans masque, sans public, sans autre témoin que la mer qui saintille derrière les vitres. Alors reste, murmure-t-il contre ses lèvres, épouse-moi pour de vrai cette fois. Tu me demandes en mariage les hararies a traversé l’arme.

 Je te demande de devenir ma femme, ma complice, la mère de mes futurs enfants. Je te demande de transformer cette comédie en plus belle des réalités. Léa le regarde. Cet homme qui a bouleversé sa vie en quelques jours, qui lui a offert un avenir qu’elle n’osait plus espérer, qu’il l’aime pour ce qu’elle est vraiment. “Oui”, dit-elle simplement. Oui à tout.

Ils s’embrassent à nouveau, plus passionnément cette fois, scellant leur engagement mutuel. Derrière eux, la toile inachevée semble bénir leur union de ces couleurs éclatantes. “Il va falloir qu’on annonce la nouvelle”, dit Julien en la serrant contre lui.

 “À Amélie en premier, plaisante Léa, à Madame du Bois d’abord, je parie qu’elle l’a déjà deviné.” Comme pour lui donner raison, la gouvernante apparaît à la porte de l’atelier avec un plateau de thé, un sourire complice aux lèvres. “Le thé pour les jeunes mariés”, dit-elle avec un clin d’œil. Julien et Léa éclataient de rire. Comment vous avez su ? Demande Julien.

 Mon petit, quand on a élevé trois générations de beaumonts, on sait reconnaître l’amour vrai. Et puis la petite demoiselle rayonne comme un soleil depuis ce matin. Elle pose le plateau et ressort en murmurant : “Il était temps que cette maison retrouve des rires d’amoureux.” L’après-midi passe dans un tourbillon de bonheur.

 Ils font de longues promenades sur la plage, visitent le village de Duville, main dans la main, s’embrasse comme des adolescents devant les planches mythiques. Le soir, pendant le dîner aux chandelles préparé par Madame Dubois qui s’est surpassé, ils évoquent leur avenir. Il faut qu’on réfléchisse à la logistique, dit Julien. Tu vas garder ton studio à Paris ? Pour l’instant, oui.

 J’auraiis besoin d’un piét à terre si tu voyages beaucoup pour les affaires. Nous voyagerons ensemble quand c’est possible. J’ai envie de te faire découvrir le monde, Léa. Et puis, il y aura peut-être des expositions de tes œuvres dans nos hôtels à l’étranger. Tu ferais ça ? J’ai épousé une artiste, je vais la promouvoir. Il lui prend la main par-dessus la table.

 Au fait, pour notre vrai mariage, tu as une préférence. Église, mairie, grande cérémonie. Léa réfléchit. Quelque chose de simple et d’authentique. Nos vrais amis, ta famille, Margaot, peut-être ici dans le jardin. Parfait. Et pour la lune de miel ? Surprise-moi. Julien sourit mystérieusement. J’ai déjà une idée.

 Ce soir-là, il reste longtemps enlacé sur la terrasse, regardant les étoiles se refléter sur la mer. Léa repense à sa vie d’il y a une semaine. Le petit studio, les fins de mois difficiles, les rêves qui semblaient s’éloigner. Aujourd’hui, elle a trouvé l’amour, la sécurité matérielle et surtout un homme qui croit en son talent.

 “Tu penses à quoi ?” demande Julien en caressant ses cheveux. “À ce compte de fée que je suis en train de vivre. Ce n’est pas un compte de fée, mon amour. C’est notre réalité et ce n’est que le début.” Léa se blottit contre lui, le cœur plein de gratitude et d’espoir. Demain, ils retourneront à Paris annoncer leur vraie union.

 Mais pour l’instant, elle savoure ce moment parfait, bercé par le bruit des vagues et les battements du cœur de l’homme qu’elle aime. Le lundi matin, de retour à Paris, Léa et Julien décident de révéler leur vraie histoire à leurs proches. Première étape, Margaot. Léa pousse la porte du café chez Margaot vers 10h, accompagné de Julien qui a insisté pour l’accompagner.

L’effervescence matinale est retombée et seul quelques clients réguliers sirotent à leur café en lisant le journal. Léa, mon petit. Margaot sort de derrière son comptoir, les bras ouverts. Et vous devez être le fameux client mystérieux, ajoute-elle en examinant Julien avec curiosité. Julien Baumont se présente-t-il en lui serrant la main.

Enchanté madame. Léa m’a beaucoup parlé de vous. En bien, j’espère. Margot rit. Mais Léa devine qu’elle évalue son futurre avec l’œil expert d’une mère de substitution. Asseyez-vous, je vous offre un café. Et alors, ces amoureux ? Vous étiez rayonnante hier soir quand vous m’avez appelé ma petite Léa.

 Léa échange un regard avec Julien. Ils ont préparé leur explication durant le trajet de retour. Margaot, il faut qu’on te dise la vérité, toute la vérité. Et il raconte tout. Les retrouvailles de lycée, l’humiliation d’Amélie, le mensonge de Julien, le faux mariage qui devient réel.

 Margaot les écoute sans les interrompre, ses yeux pétillants, passant de la surprise à l’attendrissement. Alors comme ça mon petit prince charmant a sauvé ma Cendrillon des méchantes sorcières. Elle essuie discrètement une larme. C’est le plus beau roman d’amour que j’ai entendu depuis longtemps. Tu ne nous en veux pas de t’avoir menti ? S’inquiète Léa. Ma petite fille, vous ne m’avez pas menti sur l’essentiel.

 Vous étiez vraiment en train de tomber amoureux. Le reste, ce ne sont que des détails. Elle se tourne vers Julien. Et vous, jeune homme, vous comptez épouser Malaéa pour de bon dès que possible. Répond Julien avec un sourire. D’ailleurs, j’aimerais vous demander officiellement sa main. Margaot fond littéralement accordé.

 Mais à une condition, c’est moi qui ferait le repas de nos gratis. Bien sûr. Margaot. Léa a les larmes aux yeux. Pas de mai, c’est décidé. Et maintenant, filet annoncer la nouvelle au reste du monde. Moi, j’ai des croissants qui sortent du four. Deuxième étape, la famille de Julien. Sa sœur Pauline cadre dans une on internationale débarque dans l’après-midi au bureau de son frère, intrigué par son appel mystérieux. Tu es sérieux ? Elle examine Léa comme une pièce de musée.

 Tu vas vraiment épouser cette fille que tu connais depuis trois semaines ? Pauline ? Commence Julien. Non mais attends, d’abord tu nous sors de nulle part un mariage secret bidon et maintenant tu veux te marier pour de vrai avec la même fille. Julien, tu as pété un câble ou quoi ? Léa se lève blessé par le ton agressif.

 Je crois que je vais vous laisser. Reste, ordonne Julien en la rattrapant par la main, puis se tournant vers sa sœur. Pauline, je comprends ta surprise, mais tu ne connais pas toute l’histoire. Il lui raconte tout depuis les retrouvailles jusqu’au weekend en Normandie.

 Pauline l’écoute, son expression passant progressivement de la méfiance à la curiosité. Alors, tu l’aimes vraiment ? Demande-t-elle finalement, plus que ma vie. Pauline se tourne vers vous ? Mon frère peut-être chiant avec son côté perfectionniste. Vous êtes sûr de pouvoir le supporter ? Je l’aime avec ses défauts. Répond Léa en souriant et ses qualités les compensent largement.

Bon d’accord. Pauline sourit enfin. Bienvenue dans la famille belle- sœur. Mais si tu fais du mal à mon frangin, je viens te chercher. Message reçu rit Léa. Trisième étape et non des moindres. affronter Amélie et sa clique. L’occasion se présente le mercredi soir lors d’un vernissage dans une galerie du 7e arrondissement.

 Julien et Léa y vont ensemble officiellement pour leur premier pas mondin de couple mariés. Amélie les repère immédiatement et fond sur eux accompagné de Sophie et Thomas. Les tourteraux. Alors ce weekend en Normandie, vous avez l’air radieux tous les deux. Merveilleux, répond Léa en se serrant contre Julien.

 Cette propriété est un petit paradis et très pratique pour les escapades romantiques, ajoute Julien en embrassant tendrement les cheveux de Léa. Sophie plisse les yeux. Au fait, Léa, j’ai essayé de retrouver traces de votre mariage dans les registres de la mairie du 4è. Curieusement, je n’ai rien trouvé. Un silence tendu s’installe. Léa sent son cœur s’accélérer, mais Julien reste imperturbable. C’est normal, dit-il calmement. Nous n’étions pas mariés.

 L’effet de cette phrase sur le petit groupe est électrisant. Amélie ouvre la bouche comme un poisson hors de l’eau. “Comment ça vous n’étiez pas marié ?” bégaet-elle. “Nous ne l’étions pas”, répète Julien, mais nous le serons bientôt officiellement. Il sort de sa poche un écrin de velours bleu et l’ouvre devant l’assemblée stupéfaite.

 À l’intérieur, un solitaire en diamant d’une taille respectable saintille de tous ses feux. “Les Amoraux !”, dit-il en se mettant à genoux au milieu de la galerie. “Veux-tu m’épouser ? Autour d’eux, les conversations s’arrêtent. Tous les regards convergent vers eux. Léa sent les larmes lui monter aux yeux. “Oui”, dit-elle d’une voix tremblante. “Oui, je veux t’épouser Julien Baumont.

” Il lui passe la bague au doigt sous les applaudissements nourris de l’assistance. Amélie et sa bande sont tétanisés, incapables de réagir à ce retournement de situation. “Alors, vous avez menti ?” finit par articuler Thomas. “Nous avons anticipé”, corrige Julien en se relevant. L’amour nous a juste rattrapé plus vite que prévu. Félicitations, lance une voix dans l’assistance.

 D’autres invités s’approchent pour congratuler le couple, créant un petit attroupement qui isole naturellement Amélie et ses amis. “Je n’y comprends rien”, marmonne celle-ci déconfite. “C’est pourtant simple”, répond Léa avec un sourire radieux. Parfois les plus belles histoires d’amour commencent par un malentendu.

 Plus tard dans la soirée de retour dans l’appartement de Julien Avenue Montaigne, un duplexe somptueux avec terrasse et vu sur la tour Effel, ils trinquent au champagne pour célébrer leur victoire. “Tu as vu la tête d’Amélie ?” Riléa en admirant sa bague. “Ellle n’en revenait pas. Justice est rendue”, dit Julien en l’attirant contre lui.

 “Plus jamais personne ne te traitera avec condescendance. Même si ça arrivait, je m’en moquerai maintenant. J’ai trouvé ma place Julien avec toi. Notre place, corrige-t-il en l’embrassant. Nous sommes une équipe maintenant. Six mois plus tard, le jardin de la propriété normande de Doville n’a jamais été aussi beau qu’en ce samedi de mai.

 Les roses anciennes embaum l’air tièd, les hortanens bleus rivalisent avec l’azur du ciel et une tonnelle de glycine violette encadrent parfaitement l’hôtel improvisé face à la mer. Léa, dans une robe de mariée simple et élégante, choisie chez un créateur français émergent qu’elle a voulu soutenir, descend l’allée de Gravier au bras de Monsieur Dubois, le mari de la gouvernante, qui a accepté de la conduire à l’hôtel en l’absence de son père.

 Les invités, une cinquantaine de personnes triées sur le volet, se lèvent à son passage. Margaot, radieuse dans un tailleur rose, pleure déjà. Pauline, témoin de son frère, sourit avec émotion. Clara, venue spécialement de Lyon prend des photos avec Frénésie, mais Léa dieu que pour Julien, magnifique en costume bleu marine, qui l’attend avec un sourire éblouissant.

Quand elle arrive à sa hauteur, il lui murmure : “Tu es la plus belle mariée du monde.” “Et toi, le plus beau des maris”, répond-elle en lui prenant la main. La cérémonie, célébrée par le maire de Doville, un ami de la famille Baumont, est empreinte de simplicité et d’émotion.

 Quand vient le moment des vœux personnels ? Julien sort une feuille de sa poche. Léa commence-t-il d’une voix un peu tremblante. Il y a 6 mois, j’ai menti pour te protéger. Aujourd’hui, je veux te dire la vérité. Tu as illuminé ma vie de tes couleurs d’artiste, de ta générosité, de ton authenticité. Tu m’as appris que l’amour vrai n’a pas besoin de contrat ni de calcul.

 Je promets de te soutenir dans tes rêves, de te faire rire chaque jour et de t’aimer même quand tu auras de la peinture plein les cheveux. L’assistance rit et s’attendrit. Léa, ému aux larmes répond sans note : “Julien, tu m’as sauvé bien plus que tu ne le crois, pas seulement de l’humiliation, mais de ma propre peur d’espérer. Tu as cru en mon talent quand moi-même j’en doutais.

 Tu m’as offert un avenir que je n’osais pas rêver. Je promets de peindre notre bonheur en mille nuances, d’être ta complice dans tous tes projets et de t’aimer même quand tu travailleras trop tard au bureau. Vous pouvez embrasser la mariée annonce le maire. Julien soulève le voile de Léa et l’embrasse passionnément sous les applaudissements et les cris de joie.

 Balzac, témoin privilégié de leur premier pas d’amoureux, abois joyeusement depuis sa lisse hornée d’un nœud papillon assorti au costume de son maître. Le cocktail a lieu sur la terrasse face à la mer. Margaot, fidèle à sa promesse, a préparé un festin digne d’un restaurant étoilé.

 Canapé raffiné, fruits de mer de Normandie, spécialité régionales revisitées avec talent. “Mon petit, dit-elle à Léa en la serrant dans ses bras. Je n’ai jamais vu quelqu’un d’aussi rayonnant le jour de son mariage. Tes parents seraient si fiers.” “Ils sont là”, répond Léa en montrant son bouquet où elle a glissé des photos miniatures de ses parents. “Dans mon cœur, ils n’ont jamais cessé d’être là.

La soirée se poursuit dans une ambiance familiale et chaleureuse. Pauline prononce un discours émouvant sur son frère qui a enfin trouvé celle qui le rend vraiment heureux. Margaot raconte des anecdotes savoureuses sur Léa serveuse de café.

 Même madame du bois exceptionnellement lève son verre aux nouveaux maîtres de maison qui vont redonner vie à cette demeure. Vers minuit, alors que les derniers invités regagnent leur chambre d’hôtel à Duville, Julien et Léa se retrouvent seul sur la plage, pied nus dans le sable, leurs chaussures à la main. Alors, madame Baumont ? dit Julien en faisant tournoyer sa femme dans ses bras.

 Heureuse plus que ça, comblée, épanouie, vivante. Léa l’embrasse sous la lune et impatiente de commencer notre vraie vie. Notre vraie vie a commencé le soir des retrouvailles quand j’ai décidé de te protéger. Non, corrige Léa, elle a commencé quand nous avons décidé d’arrêter de faire semblant et de nous aimer vraiment.

 Ils remontent vers la maison main dans la main, laissant leurs empreintes côte à côte sur le sable humide. Demain, ils partiront pour leur lune de miel. Deux semaines en Toscane entre vignoble et ateliers d’artistes, Julien a organisé le voyage comme une chasse au trésors artistique emmenant Léa découvrir les techniques des maîtres dans leur berceau historique.

 Mais pour l’instant, ils savourent ce moment parfait, leur première nuit en tant qu’époux dans cette maison qui a vu naître leur amour, bercé par le bruit des vagues et l’immensité de leur bonheur. Épilogue. 2 ans plus tard, l’exposition portrait d’âme à la galerie Maect fait sensation. Les œuvres de Léa Baumont. Elle a gardé son nom d’épouse pour sa signature artistique, attire collectionneur et critique.

 Ces toiles inspirées de rencontres anonymes dans le métro, les cafés, les rues de Paris révèlent avec une sensibilité rare la beauté cachée des gens ordinaires. “L’artiste nous offre un regard humaniste sur notre époque”, écrit le Figaro. Ses portraits saisissent l’émotion pure, l’authenticité des êtres au-delà des apparences.

 Julien en smoking circule fièrement parmi les invités du vernissage dirigeant discrètement les acheteurs potentiels vers les œuvres de sa femme. Léa, radieuse dans une robe noire signée d’un jeune créateur qu’il patronne ensemble échange avec passion sur son travail.

 Madame Baumont l’interpelle un journaliste d’artpress, votre mari vous a-t-il influencé dans votre approche artistique ? Au contraire, répond Léa en souriant. Il m’a appris à assumer pleinement qui je suis. Mes toiles n’ont jamais été aussi libres que depuis que je suis heureuse. Dans un coin de la galerie, Amélie observe la scène avec amertume.

 Marié depuis peu à un banquier ennuyeux mais fortuné, elle n’a jamais digéré sa défaite. Sophie à ses côtés soupire. Il faut reconnaître qu’elle a réussi sa vie. Mariage d’amour, carrière artistique, reconnaissance, tout ce qu’on rêvait d’avoir. Par chance, marmonne Amélie. Pure chance. Tu crois ? Sophie observe Léa qui rit aux éclats à une plaisanterie de Julien.

 Moi, je pense qu’elle a juste su saisir sa chance quand elle s’est présentée et reconnaître l’amour vrai quand il est arrivé. La soirée se termine par un succès complet. 12 toiles vendues, trois commandes de portrait et des critiques d’ Tirambique. En rentrant à Venue Montaigne, Léa et Julien s’arrêtent dans leur ancien café du 11e pour saluer Margaot.

 Mais petit alors cette exposition ? Un triomphe, annonce Julien en embrassant la brave femme. Notre artiste national va être submergé de commande. Et toi, Maléa heureuse ? Léa regarda autour d’elle. Ce café où elle a servi des années durant. Cette femme qu’il a soutenu sans jamais douter. Cet homme qu’il a aimé avant même de la connaître vraiment. Margaot, dit-elle en la serrant dans ses bras.

 Il y a deux ans, j’avais peur d’espérer. Aujourd’hui, je n’ai plus peur de rien. L’amour m’a rendu invincible et ce n’est que le début. ajoute Julien en posant sa main sur le ventre encore plat de sa femme. Margaot écarquille les yeux. “Tu veux dire que dans se mois”, confirme Léa en rougissant, un petit beaumont qui aura peut-être l’âme d’un artiste ou d’un entrepreneur philanthrope complète Julien ou les deux.

 Margaot pleure de joie et sort immédiatement une bouteille de champagne rosée. Il faut fêter ça, l’avenir mes enfants, l’avenir qui s’annoncera Dieu. Dehors, Paris saintille de toutes ces lumières. Dans quelques mois, Léa et Julien accueilleront leur premiers enfants dans la maison de Duville entre ateliers d’artistes et bibliothèques familiales.

 Leur histoire, née d’un mensonge généreux est devenue la plus authentique des vérités. Et parfois, quand ils se promènent sur la plage normande au coucher du soleil, ils repensent à cette soirée de novembre où tout a basculé. Un soir où l’amour a pris le visage du courage, où le hasard a révélé l’évidence, où deux âmes solitaires ont découvert qu’elles étaient fait l’une pour l’autre.

 Car les plus belles histoires d’amour ne commencent pas toujours par il était une foi, mais parfois par “Excusez-moi, je peux vous emprunter ma femme”. M.

 

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