News

Le Coup de Théâtre d’Onfray : Le Philosophe Fait Taire la Journaliste et Dénonce le « Cinéma » du Fascisme

Un échange électrique, à la limite de l’incident diplomatique sur un plateau de télévision, est rapidement devenu viral. Le philosophe Michel Onfray, habitué des controverses et des joutes verbales, a livré une performance qui restera dans les annales, non seulement pour la densité de ses idées, mais surtout pour l’intensité du bras de fer qui l’a opposé à la journaliste. Au-delà du spectacle, c’est une analyse politique et sociale sans concession que l’auteur a assénée, pointant du doigt la responsabilité de l’Europe libérale dans la montée des extrêmes et dénonçant un “cinéma” médiatique qui divertit de la véritable misère.

L’entretien, centré sur la publication de ses derniers ouvrages – Le fétiche et la marchandise sur la marchandisation et Théorie de Jésus – a rapidement basculé vers l’actualité brûlante, en l’occurrence les résultats surprenants des élections législatives aux Pays-Bas, ayant vu la victoire de l’extrême droite menée par Geert Wilders. C’est à partir de ce point que le débat a pris une tournure inattendue, Onfray refusant d’être enfermé dans les cases habituelles, et réclamant le droit de dérouler une pensée nuancée, mais dérangeante.

 

La Leçon Cinglante : Contre l’Europe Libérale, pas Contre l’Europe

 

L’une des premières étincelles a jailli lorsque la journaliste a qualifié Geert Wilders d’« anti-Europe », une étiquette que Michel Onfray s’est empressé de corriger avec une force philosophique. « Il n’est pas anti-Europe, il est contre une certaine Europe », lance-t-il. Cette distinction est la pierre angulaire de toute la démonstration du philosophe. Onfray affirme qu’être contre l’Europe libérale, ce n’est pas être contre l’idée européenne elle-même. Son combat n’est pas continental, mais idéologique : « Moi je suis contre l’Europe libérale non pas parce qu’elle est Europe, mais parce qu’elle est libérale ».

La cible est claire : l’Union européenne, telle qu’elle est instituée depuis plus de 30 ans, et plus précisément l’Europe de Maastricht. Onfray la décrit comme un pouvoir sans contre-pouvoir, dont la principale stratégie est de « fasciser tous ceux qui sont dans le contre-pouvoir ».

Il remonte l’histoire jusqu’à 1992, moment où la France aurait « renoncé à la souveraineté ». Le souvenir de 2005 est encore vif dans sa critique : après le « Non » des Français au référendum sur la Constitution européenne, les « maastrichtiens » — qu’il s’agisse de Sarkozy, Hollande ou Macron — auraient imposé leur volonté par le Traité de Lisbonne en 2008. Cette manipulation démocratique, selon lui, est la cause profonde du désengagement civique : « Ne nous demandez pas notre avis si c’est pour le jeter à la poubelle ».

 

Le « Cinéma » du Mépris et la Question de la Légitimité

 

C’est dans l’affirmation de ce point central que le ton monte et que l’interview se transforme en confrontation. Le philosophe, interrompu à plusieurs reprises, ne mâche pas ses mots, demandant sèchement à la journaliste de le laisser finir, car elle lui posait des questions alors qu’il était en train de donner les réponses.

Cette tension culmine lorsque la journaliste suggère qu’Onfray est « particulièrement presque agressif, c’est-à-dire presque comme un animal blessé ». Le philosophe rejette immédiatement cette lecture psychologisante, la qualifiant de « petit cinéma ». Il s’appuie sur son propre statut d’« interdit de service public » pour illustrer la répression systémique exercée contre ceux qui portent une voix dissidente. Pour lui, la journaliste déplace le débat sur le terrain de l’émotion et de l’attaque ad hominem pour éviter d’aborder le fond de sa critique politique.

Au cœur de cette critique, il y a la légitimité du pouvoir actuel. Onfray conteste l’élection d’Emmanuel Macron, soulignant qu’il a été élu avec l’abstention de 50 % des électeurs, et une partie de l’autre moitié votant non pas pour lui, mais contre Marine Le Pen, présentée comme une « dangereuse fasciste ». Pour Onfray, la démocratie est « une litote de le dire comme ça », car les résultats des urnes et la volonté populaire sont systématiquement ignorés au profit d’une idéologie libérale européenne.

 

Le FN et le RN : L’Héritage N’est pas la Faute

 

La discussion dérive ensuite naturellement vers la question du Rassemblement National (RN) et de Marine Le Pen, poussé par les questions de la journaliste sur la cohérence entre son combat anti-Le Pen de 2002 (qui l’avait amené à créer l’Université Populaire de Caen) et sa position plus nuancée aujourd’hui.

Michel Onfray, avec une rigueur historique, opère une distinction nette entre le père et la fille. Il confirme sans ambiguïté que Jean-Marie Le Pen était un « antisémite », un « fasciste » et un « pétainiste », s’appuyant sur sa lecture des mémoires. Mais il refuse d’appliquer la « faute des parents aux enfants ». En s’inspirant de l’exemple du Parti communiste (PC) — dont il refuse qu’on fasse payer éternellement au PC actuel les fautes historiques du pacte germano-soviétique —, il juge Marine Le Pen sur ses actes et ses paroles présentes, non sur l’héritage paternel. « Ça n’a pas grand-chose à voir avec ce que dit son père », tranche-t-il.

 

Ce qui agace le plus le philosophe, c’est le rôle des médias dans cette focalisation : le débat sur l’antisémitisme de Jean-Marie Le Pen, et la difficulté de Jordan Bardella à le reconnaître, est décrit comme un « piège » médiatique. Un piège qui, sciemment, déplace les trous pour faire tomber les interviewés et, surtout, détourne l’attention des réalités sociales : « le problème, c’est pas de savoir si Jean-Marie Le Pen étant fasciste ou étant antisémite, sa fille le serait ».

Le vrai problème ? Les Français qui « réduisent leur repas aujourd’hui parce qu’ils sont pauvres », ceux qui n’ont pas d’argent pour les cadeaux de Noël, ou ceux qui « travaillent aujourd’hui [et] dorment dans leur voiture ». C’est la « paupérisation » marxiste produite par le libéralisme qui est, selon Onfray, la seule et unique cause du vote « tout casser, tout secouer » qui porte les extrêmes au pouvoir, aux Pays-Bas comme en France.

 

L’Effondrement de l’Autorité et la Question Algérienne

 

En fin d’entretien, le débat s’ouvre sur le drame de Crépole et la « faillite générale de notre société » évoquée par Gérald Darmanin. Michel Onfray donne raison au ministre : « depuis Mai 68, il y a un effondrement de toute autorité ». Pour le philosophe, la France vit un « retour de la jungle », où la loi n’est plus appliquée, notamment face aux délits liés au port d’arme blanche.

Il dénonce le rôle des mouvements comme La France Insoumise qui, par leur vigilance contre le « contrôle au faciès », empêchent la police d’exercer son contrôle, rendant l’interdiction de porter un couteau complètement « sur le papier tout ça ». Le système se paralyse lui-même, créant des zones de non-droit.

Enfin, Onfray aborde le lien entre immigration et délinquance, avec une distinction sémantique essentielle : « L’Islam ne pose pas un problème en France », citant l’exemple des Indonésiens musulmans. Le problème, selon lui, est le « Maghreb islamique », en raison des relations historiques complexes et inachevées, notamment avec l’Algérie et les « accords d’Évian » de 1962. Il souligne l’hypocrisie des dirigeants algériens qui viennent se faire soigner en France tout en continuant la rhétorique anti-française du FLN.

Il conclut que la délinquance dans ces communautés est souvent liée à la pauvreté, au manque d’intégration et à l’absence de pouvoir d’achat. Le philosophe se positionne alors en analyste froid : « Mon travail de philosophe, c’est […] de dire pourquoi les a-t-il [Wilders] gagnés ? ». La réponse, cinglante, est la même : c’est la conséquence de l’ultralibéralisme et du mépris des élites pour le « petit peuple » et les « sans grades ».

 

Un Appel à la Lucidité

 

Au-delà de la performance théâtrale qui a fait le buzz, Michel Onfray a réussi à ramener la discussion sur ses termes : le clivage idéologique n’est plus entre la Gauche et la Droite, mais entre le libéralisme (porté par Bruxelles et les élites françaises) et la souveraineté (portée par les votes protestataires). L’« animal blessé », c’est la démocratie française, et le « cinéma », c’est la manière dont les médias tentent de masquer cette blessure profonde par des querelles de personnes. Le philosophe, en provoquant le conflit, a forcé une prise de conscience, celle d’une France de plus en plus fracturée, où les mêmes causes économiques produiront « évidemment » les mêmes effets politiques. L’arrivée au pouvoir de Marine Le Pen aux prochaines élections, dit-il, n’est qu’une conséquence logique et inéluctable du déni des élites. L’entretien est une véritable « masterclass » sur l’art de la joute, mais surtout, une alarme retentissante sur l’état d’une République minée par sa propre indifférence sociale.

Related Articles

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

Back to top button